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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

septembre 2002

L'entente Microsoft-Université Waterloo soulève des questions

Le partenariat annoncé le mois dernier entre Microsoft Canada et l'Université de Waterloo a déchaîné les critiques de la part de la population étudiante et du corps professoral.

Dans une lettre adressée au recteur de l'université David Johnston, la Faculty Association of the University of Waterloo a demandé que le conseil d'université examine minutieusement l'entente avant qu'elle ne soit complétée.

" Nous craignons que Microsoft finance l'élaboration des programmes d'études ", a déclaré la présidente de l'association, Catherine Schryer. " Par conséquent, nous demandons que les questions en jeu dans cette annonce de financement figurent en tête de l'ordre du jour du prochain conseil d'université. Nous estimons qu'une diffusion complète de ces enjeux et un éclaircissement du rôle de Microsoft seraient dans le meilleur intérêt de tout le monde. "

Selon les conditions de l'entente de commandite, l'université recevra 2,3 millions de dollars pendant cinq ans de Microsoft Academic Innovation Alliance dans le but de financer les programmes d'enseignement et de recherche. En échange, l'université doit utiliser un nouveau langage de programmation de Microsoft appelé Visual C# qui sera l'élément principal du cours de programmation informatique de première année. De même, tous les élèves du secondaire admis au programme de génie électrique et informatique devront suivre un cours d'introduction en ligne sur le langage de Microsoft.

" Nous sommes inquiets parce qu'il est possible que les procédures établies pour garantir l'efficacité des programmes d'études soient contournées, que la liberté universitaire des membres du corps professoral dispensant ces cours soit compromise, que le programme d'études de cours précis donne l'impression de provenir d'une source externe et que l'on puisse croire que l'université approuve les produits d'un organisme externe ", a ajouté Mme Schryer dans sa lettre au recteur Johnston.

Des groupes étudiants ont aussi mis en doute l'entente et ont demandé que leurs préoccupations soient débattues publiquement.

" Le partenariat ajouté aux modifications des cours obligatoires établit un dangereux précédent quant à l'autonomie de l'université envers ses programmes d'études ", a déclaré l'University of Waterloo Engineering Society dans une lettre envoyée aux dirigeants de l'université.

Le tout nouveau langage de programmation de Microsoft a été dévoilé il y a deux ans dans le but de concurrencer le populaire langage Java de la société rivale Sun Microsystems. À l'inverse de Java toutefois, qui tourne sur tous les systèmes d'exploitation, le langage C# n'est compatible qu'avec l'environnement Microsoft.

" Cette entente est très bonne pour Microsoft " a confié au Bulletin un membre du corps professoral, sous le couvert de l'anonymat. " Moyennant une somme relativement minime, la société peut acheter la bonne réputation de l'Université de Waterloo et dire que l'école de science informatique est la première au pays à contribuer à mousser le langage C# comme étant la nouvelle norme en matière de programmation. "

Les dirigeants de l'université ont été inondés d'appels téléphoniques et de courriels de la part d'étudiants, de professeurs, d'anciens étudiants et d'autres personnes inquiets des conséquences de ce partenariat sur l'autonomie pédagogique de l'université. En guise de réponse, l'administration a affiché sur son site Web les modalités de l'entente dans l'intention de faire taire les critiques voulant que l'indépendance de l'université soit à vendre.

" Nous avons une longue et solide tradition pour ce qui est d'accepter des fonds et d'autres ressources du secteur privé et d'en faire bon usage tout en continuant d'affirmer notre indépendance ", affirme le feuillet d'information. " Et nous continuerons à le faire. "

L'université a ajouté que l'emploi du langage C# ne sera pas exclusif bien qu'il soit le " principal outil " utilisé dans le cours de première année.

Des critiques affirment qu'il reste encore de nombreuses questions à répondre.

" Le problème ne se réglera pas de sitôt " a dit Jeff Henry, vice-président de l'association de génie, au Kitchener-Waterloo Record.