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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

mai 2007

Quelle différence 12 ans peuvent faire! L’ACPPU en mouvement (2e partie)

Par Greg Allain
J'ai toujours dit qu’il valait la peine de célébrer les anniversaires et les étapes de la vie d’une organisation. En février, nous nous sommes installés dans nos nouveaux bureaux situés à deux pas de notre ancien immeuble, que nous occupions depuis 1994. Le moment est donc bien choisi pour passer en revue les progrès que nous avons accomplis en un peu plus d’une décennie. Dans ma chronique du mois d’avril, j’ai souligné les divers facteurs à l’origine de la remarquable croissance du nombre de nos membres, qui a augmenté de 42 % pendant cette courte période. Nos activités et nos services se sont aussi multipliés : j’ai traité dans ma dernière chronique du dossier de la négociation collective. J’aimerais maintenant examiner la croissance que nous avons enregistrée dans un autre secteur, à savoir la défense de la liberté académique.

L’ACPPU défend avec ardeur la liberté académique depuis sa création en 1951, et tout particulièrement depuis la célèbre affaire Harry Crowe en 1958, année où l’association a mis sur pied son premier comité d’enquête, composé de deux universitaires très connus, Vernon Fowke et Bora Laskin. Notre travail dans ce secteur a toutefois pris beaucoup d’ampleur à la suite de la très importante affaire Olivieri qui, apparue vers la fin des années 1990, est devenue rapidement et à juste titre une cause célèbre internationale. Cette offensive sans précédent contre la liberté académique dans un milieu médical a suscité la création du premier comité d’enquête indépendant de l’ACPPU, qui s’est penché pendant plusieurs années sur cette affaire extrêmement complexe. Produit en 2001, le volumineux rapport du comité a été publié avec la James Lorimer et Company dans la série d’ouvrages de l’ACPPU. Il s’agit du troisième titre de la collection, qui en comporte huit jusqu’à maintenant, et il est notre « best-seller » dans le monde entier.

D’autres causes de première importance en matière de liberté académique sont survenues dans les années qui ont suivi, notamment les cas de David Healy, Gabrielle Horne, David Noble, Mary Bryson, Kin-Yip Chun, Stéphane McLachlan, Anne Duffy et Paul Grof. Bon nombre d’entre elles concernaient le milieu médical et impliquaient l’interaction complexe d’universités, d’écoles de médecine, d’hôpitaux et de régies régionales de la santé, de programmes alternatifs de financement et de plans de pratique, ainsi que de compagnies pharmaceutiques parrainant la recherche en santé.

Le fait que la liberté académique des cliniciens et des chercheurs associés à des universités ait été de plus en plus menacée n’était pas une coïncidence : dans la plupart des écoles de médecine, les structures sont hiérarchiques et rigides et il n’y a généralement pas de tradition de gouvernance collégiale. C’est pourquoi l’ACPPU a mis sur pied le Groupe de travail sur la liberté académique des professeurs travaillant dans des établissements de soins de santé affiliés à des universités (qui a produit en 2004 un rapport intitulé À la défense de la médecine : les professeurs de clinique et la liberté académique), et a formé un comité consultatif chargé de présenter au Comité de direction les préoccupations du personnel académique clinicien.

À l’heure actuelle, trois cas concernant des professeurs cliniciens des universités Memorial, Dalhousie et d’Ottawa sont examinés par des comités d’enquête indépendants constitués par l’ACPPU.

L’ACPPU a établi un autre mécanisme de règlement des atteintes à la liberté académique. Il s’agit des comités d’enquête spéciaux, qui rendent compte au Comité de la liberté académique et de la permanence de l’emploi de l’ACPPU et qui donnent ainsi à l’ACPPU la possibilité de négocier une solution aux problèmes constatés avant que le rapport d’enquête ne soit rendu public (ou pour éviter une telle mesure). L’ACPPU attend actuellement les rapports de deux comités spéciaux. Les trois derniers rapports produits par de tels comités portaient sur les affaires Eileen Hogan (Acadia) et Laurent Leduc (Toronto) — tous les deux publiés en 2006 — et l’affaire George Nader (Trent), dont le rapport a été publié dans le Bulletin du mois d’avril.

Évidemment, le recours de plus en plus fréquent aux comités d’enquête est venu modifier le mandat du Comité de la liberté académique et de la permanence de l’emploi, qui ne mène plus d’enquêtes sur les cas individuels d’atteinte à la liberté académique. Maintenant, ce comité se consacre surtout à l’élaboration de politiques et, dans cette optique, produit divers énoncés de principes, des clauses modèles et des documents de travail.

À partir également des enseignements tirés de l’affaire Olivieri, l’ACPPU a créé il y a quelques années le Fonds de la liberté académique, une sorte de régime d’« assurance-catastrophe » garantissant aux associations locales les moyens financiers nécessaires pour défendre jusqu’au bout toute cause touchant à la liberté académique et impliquant des coûts majeurs. Le fonds, dont l’objectif initial a été fixé à un million de dollars, a atteint environ 840 000 $ le mois dernier (en contributions faites ou promises), grâce à l’énorme générosité des associations locales de partout au pays. Dernièrement, 250 000 $ ont été versés aux associations membres de l’Université de la Colombie-Britannique, de l’Université de Regina et de l’Université Laurentienne pour les aider à poursuivre des luttes particulièrement longues et coûteuses en vue de défendre leurs membres. Le fonds s’établit donc maintenant à environ 600 000 $.

Dans ce contexte, j’aimerais inviter les associations qui n’ont pas encore fait de dons d’envisager sérieusement la possibilité de le faire, et celles qui ont déjà versé une cotisation, de songer à y contribuer à nouveau, sous forme de paiement unique ou de versement annuel. Ceci ressemble-t-il à de la promotion? Vous avez tout à fait raison : c’en est! La liberté académique est la pierre angulaire de notre profession, et nos associations membres, tout comme l’ACPPU, se sont engagées à la défendre vigoureusement. Or, cette défense a un prix. Mais pour reprendre un argument de style publicitaire, n’oubliez pas que la prochaine victime pourrait être… vous!

Établie en 2003 pour appuyer les projets d’éducation et de recherche dans ce secteur, la Fondation Harry Crowe est un autre mécanisme destiné à faire connaître les enjeux relatifs à la liberté académique. S’agissant d’un organisme de bienfaisance enregistré, la fondation peut émettre des réçus aux fins de l’impôt à l’intention des personnes qui soutiennent financièrement ses activités. La première grande activité de la fondation a été la tenue, en 2005, de la conférence sur la Liberté académique dans le contexte de l’après-11 septembre 2001, qui a attiré des participants de partout au pays et dans le monde. Des articles rédigés à partir des exposés présentés à la conférence sont réunis dans le huitième ouvrage de la collection de l’ACPPU, qui a été publié le mois dernier sous la direction de James Turk, directeur général de l’ACPPU, et d’Allan Manson, de l’Université Queen’s. Le titre en est Free Speech in Fearful Times: After 9/11 in Canada, the U.S., Australia and Europe. L’automne prochain, la Fondation Harry Crowe tiendra une autre conférence, sur La protection de l’intégrité du travail académique (voir L’intégrité académique au coeur d’une conférence).

La liberté académique est aujourd’hui essentielle à l’éducation postsecondaire ainsi qu’à la réalisation de toutes nos activités quotidiennes en matière d’enseignement, de recherche et de service. L’ACPPU joue un rôle plus proactif que jamais dans ce domaine de premier plan, poussée par la multitude des causes de portée capitale survenues ces dix dernières années et, en particulier, par celles de nos collègues des écoles de médecine.

Depuis 1994, l’ACPPU a aussi étendu ses activités et ses services dans de nombreux autres secteurs : création de nouveaux cours, ateliers et publications; accroissement de nos activités de communication; importance accrue accordée à la santé et à la sécurité au travail; augmentation de l’effectif des services juridiques; adhésion à diverses coalitions progressistes; création de prix pour souligner des contributions exceptionnelles dans des domaines particuliers; renforcement de la présence de l’association sur la scène internationale. La suite sur ces thèmes dans ma chronique de juin!