L'Internationale de l’Éducation (IE) et l’ACPPU sont sur le point de publier un rapport sur la situation du personnel académique en Israël, en Cisjordanie et à Gaza. L’IE est une fédération mondiale de syndicats d’enseignants qui défend les droits du personnel académique dans plus de 172 pays et territoires.
L’IE procède régulièrement à des évaluations de la mise en application de la recommandation de l’UNESCO de 1997 concernant le statut du personnel enseignant de l’enseignement supérieur — un document dans l’élaboration duquel l’ACPPU a joué un rôle moteur. Cette recommandation énonce les principes d’équité auxquels devraient être subordonnées les conditions d’emploi du personnel académique, la liberté académique, la responsabilité professionnelle et l’autogestion pour le personnel académique.
Les résultats de ces évaluations sont publiés et diffusés à l’échelle internationale. La plus récente d’entre elles, qui porte sur Israël et la Palestine, a été conduite par David Robinson, directeur général associé de l’ACPPU, qui s’est rendu dans cette région du globe plus tôt cette année.
Si, en Israël et en Cisjordanie, M. Robinson a pu s’entretenir avec des enseignants, des permanents syndicaux, des étudiants, des administrateurs ainsi que des représentants d’organismes de défense des droits de la personne, il a dû, à Gaza, mener ses entrevues par téléphone en raison des restrictions de déplacements. Son rapport de mission et les recommandations qui en découlent seront présentés ce mois-ci au Conseil de l’ACPPU.
M. Robinson situe son rapport dans le contexte de l’obligation faite aux États membres de respecter les normes énoncées dans la recommandation de l’UNESCO de 1997, qui considère le droit du personnel enseignant à la liberté académique et l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur et leur obligation de rendre des comptes comme des éléments essentiels au maintien de l’équité et de la liberté académique.
Le rapport révèle que la gouvernance est devenue un sujet de préoccupation pour les universitaires israéliens. Un rapport publié en 2001 recommandait des réformes qui, comme le craignaient bon nombre d’entre eux, entraveraient sérieusement la gouvernance collégiale et mettraient en péril la liberté académique. La détérioration des conditions de travail suscite également de vives inquiétudes. Les syndicats de professeurs soutiennent que les faibles salaires, par rapport à ceux versés aux universitaires en Amérique du Nord, poussent de nombreux membres du personnel académique à aller travailler à l’étranger, créant ainsi une grave pénurie d’effectifs dans les établissements d’enseignement israéliens. Et cela sans compter la précarisation qui ne cesse de miner les conditions de travail du personnel académique et qui fragilise la liberté académique.
Néanmoins, la plus grande menace qui pèse sur la liberté académique réside dans le débat au sein d’Israël sur l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Bien que de nombreux universitaires israéliens s’expriment librement sur cette question politique, un certain nombre d’entre eux, du fait de leurs opinions prêtant à controverse, ont été victimes de représailles internes et externes. Dans certains collèges et universités, les activités politiques et les manifestations ont été sévèrement limitées, et des manifestants ont été arrêtés.
En Cisjordanie et à Gaza, l’éducation supérieure est dispensée par des établissements publics, autonomes et sans but lucratif, par des établissements subventionnés par l’État et par des universités privées. Les universités et les collèges se trouvent toutefois dans une situation
financière critique et, de ce fait, la part du financement privé s’est accrue de façon spectaculaire. Les droits de scolarité sont si élevés que la majorité des étudiants n’ont pas les moyens de les acquitter. La crise financière globale a entraîné une chute des dons, exacerbant davantage une situation déjà précaire.
Les conditions de travail du personnel académique sont généralement mauvaises et les salaires sont inférieurs à la normale. Les conditions d’enseignement sont difficiles, les charges de travail sont énormes et les effectifs sont insuffisants. La recherche et l’enseignement sont sérieusement freinés par les restrictions qu’imposent les Israéliens sur une variété d’importations, dont le matériel scientifique et autres outils de recherche, les ordinateurs, les appareils de laboratoire et même les craies et les manuels. Aussi n’est-il pas surprenant de voir les universitaires partir en masse pour la Jordanie et les autres pays arabes.
M. Robinson note dans son rapport que les conséquences de telles conditions de travail, qui sont courantes dans les pays pauvres, perdent de leur importance par rapport aux effets dévastateurs du blocus israélien de Gaza et des restrictions de déplacements imposées aux résidents de la Cisjordanie qui rendent quasiment impossibles les activités académiques normales.
Les délais d’attente et les fermetures des points de passage empêchent régulièrement les étudiants et les professeurs de se rendre sur leurs campus. Les établissements sont forcés de fermer tôt en raison des restrictions de déplacements, et bon nombre d’étudiants et de membres du personnel académique ne peuvent se déplacer d’un campus à l’autre à cause des barrières de sécurité. Il est très difficile pour les universitaires palestiniens de la Cisjordanie d’entrer en Israël pour y faire de la recherche ou étudier, et ils se heurtent à de nombreux obstacles lorsqu’ils souhaitent assister à des conférences et mener des travaux de recherche coopérative à l’extérieur de la région. Les étudiants de Gaza n’ont généralement pas le droit d’étudier à l’extérieur du territoire, même en Cisjordanie.
Entre autres constatations, M. Robinson attire l’attention sur des cas d’arrestation arbitraire et de détention d’étudiants et de professeurs par les forces militaires israéliennes. Il observe comment le conflit Hamas-Fatah en cours entraîne également la détention et le harcèlement d’étudiants et de membres du personnel.
Les conclusions du rapport mettent en évidence de sérieuses violations des principes de l’UNESCO en Cisjordanie et à Gaza. Je vous recommande vivement de lire ce document dès qu’il sera publié et j’espère que vous soutiendrez l’action que nous menons avec nos collègues des autres pays pour corriger ces problèmes.