Back to top

CAUT Bulletin Archives
1996-2016

September 2010

Mobilisation en faveur du recensement détaillé

Plus de 300 organismes se sont mobilisés pour réclamer le rétablissement du formulaire détaillé obligatoire du recensement depuis que le gouvernement Harper a décidé de rendre désormais facultative la parti­cipation à cette enquête.

Des intervenants provenant d’horizons aussi divers que le milieu des affaires, la recherche universitaire et la promotion de la justice sociale manifestent haut et fort leur opposition à cette mesure et demandent au gouvernement de reconsidérer sa décision à travers le texte d’une pétition en ligne qui a réuni jusqu’à présent plus de 16 000 signatures.

Pour justifier l’abolition du formulaire long en vue du recensement de 2011, le gouvernement invoque les nombreuses plaintes qu’il aurait reçues de Canadiens, mais sans présenter de preuves à l’appui de cette affirmation. La version abrégée du formulaire demeure toutefois obligatoire.

Les modifications au processus du recensement ont été décidées sans aucune consultation ni sondage auprès du vaste groupe d’interve­nants concernés.

Le gouvernement a par surcroît fait fi des recommandations de Statistique Canada, dont le chef a remis sa démission en juillet, expliquant que l’organisme n’avait jamais convenu, comme le prétendait le gouvernement, qu’un recensement à participation facultative serait tout aussi valable statistiquement.

« Les gouvernements provinciaux utilisent exclusivement les données du formulaire détaillé pour établir l’orientation des services offerts à leurs populations et pour élaborer les politiques qui régissent l’éducation élémentaire, secondaire et postsecondaire », observe le directeur général de l’ACPPU, James Turk.

De même, les administrations locales et les conseils scolaires comptent sur les données du recensement pour planifier en vue de l’avenir, ajoute-t-il. « Les données démographiques sur les divers quartiers des villes permettent aux dirigeants de prendre des décisions éclairées sur l’emplacement des écoles, des services de transport, des services communautaires et sociaux, des garderies et des programmes de formation linguistique dispensés aux nouveaux Canadiens. »

« Seul le recensement détaillé est en mesure de produire l’information suffisante pour cerner les besoins des communautés et leurs caracté­ristiques sociales et démographi­ques », souligne M. Turk. « C’est, entre autres, la seule source d’information fiable sur le lieu de résidence et le nombre des Canadiens autochtones. »

Les nouvelles entreprises, indique-t-il, se servent des données du recensement détaillé pour déterminer où s’installer, à partir de paramètres de mesure tels que le niveau d’ins­truction, le revenu et le type d’emploi dans des endroits particuliers. Les compagnies en place ont besoin des données du recensement pour cibler leurs segments de mar­ché, déterminer l’emplacement de leurs nouveaux points de vente et définir les types de produits à offrir selon la succursale.

« Le questionnaire détaillé est utilisé comme point de référence pour d’autres enquêtes importantes, comme celle sur la population active qui sert à mesurer le taux de chômage et les autres taux d’acti­vité enregistrés dans les comptes économiques nationaux », a fait valoir Michael Ornstein, directeur de l’Institut de recherche sociale à l’Université York, lors de sa comparution avec M. Turk, pour le compte de l’ACPPU, devant un comité parlementaire chargé d’étudier la controverse autour du recensement.

Selon lui, la suppression du caractère obligatoire du recensement empêchera le Canada d’évaluer la qualité des données recueillies par Statistique Canada et d’autres organismes et de prendre les mesures utiles pour corriger cette information au besoin, ce qui minera le système entier de statistiques sociales et économiques au pays et portera atteinte à la réalisation des enquêtes normalisées servant à comparer le Canada avec les autres membres de l’OCDE et aussi avec les autres pays en général.

L’an prochain, en remplacement du questionnaire détaillé obligatoire, le gouvernement compte envoyer par la poste un nouveau formulaire d’enquête facultatif à 30 % des foyers canadiens, à un coût supplémentaire estimé à 30 millions de dollars.

« Nous savons, d’après les recherches effectuées, que le taux de réponse sera sensiblement plus bas, particulièrement chez certains groupes, tels les jeunes, qui sont en général plus mobiles, les gens les plus pauvres, les gens très riches et ceux qui n’appartiennent pas à des communautés anglophones », a signalé M. Ornstein. « Alors que le caractère obligatoire du recensement permettait d’obtenir un taux de réponse invariablement élevé de 95 %, ce taux se situera entre 60 % et 75 % une fois l’enquête devenue facultative. Les résultats seront donc biaisés peu importe le nombre de foyers à qui le questionnaire sera envoyé. »

Avec l’appui du NPD et du Bloc Québécois, les libéraux déposeront, à la rentrée parlementaire de l’automne, un projet de loi visant à rétablir le questionnaire détaillé obligatoire.