Les paiements de transfert aux provinces ont constitué pendant de longues années les sommes les plus considérables versées par le fédéral au titre de l'enseignement postsecondaire.
Créé par les libéraux après la Seconde Guerre mondiale, ce programme a donné lieu à la mise sur pied du Financement des programmes établis (FPE) en 1976-1977 pour la santé et l'enseignement postsecondaire. Il ne fait pas de doute que le financement fédéral a nourri l'essor prodigieux de l'enseignement postsecondaire au Canada au cours des quarante dernières années.
Dans leur budget de 1995, les libéraux ont abandonné toute prétention à un financement de l'enseignement postsecondaire par le fédéral. Ce budget leur a par contre donné le mandat de créer une enveloppe globale consolidant les paiements de transfert aux provinces et remplaçant un financement distinct pour les soins de santé, l'enseignement postesecondaire et l'assistance sociale.
Le nouveau transfert, connu au départ comme le Transfert social canadien, a ensuite été nommé le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. L'ACPPU a recommandé qu'il change de nom à nouveau et qu'il s'appelle le Transfert canadien en matière de santé, d'éducation et de programmes sociaux.
Paul Martin, le ministre des Finances, a annoncé l'année dernière une réduction draconienne de 3,5 milliards de dollars en espèces du Transfert pour 1996-1997. Le budget de 1996 prévoyait d'autres compressions de 2,5 milliards de dollars en espèces pour 1997-1998, suivies de réductions de près de 700 millions de dollars en 1998-1999 et en 1999-2000.
Les crédits totaux du Transfert augmenteront légèrement après l'an 2000. Depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux, l'ensemble des compressions se chiffrent à 7,6 milliards de dollars en espèces ou représentera une baisse de 40,7 p. 100 d'ici aux années 1999 et 2000.
Certains gouvernements provinciaux refilent déjà la note au secteur de l'enseignement postsecondaire.
D'après Orientations 1996 de l'AUCC, les compressions effectuées aux subventions provinciales de fonctionnement dans les années 1990 signifient que le soutien du gouvernement, en cinq ans seulement, a diminué de 800 $ par étudiant en dollars constants. Il ne représente guère maintenant que 70 p. 100 du revenu de fonctionnement. En 1990, il représentait presque 80 p. 100.
Par ailleurs, le revenu de fonctionnement provenant des frais de scolarité a augmenté depuis 1988.
Lorsqu'elle était présidente de l'ACPPU, Mme Joyce Lorimer a écrit au secrétaire d'État, Jon Gerrard, au sujet de la stratégie fédérale en matière de recherche et de développement. Elle lui a fait remarquer que les paiements de transfert aux provinces avaient subi des compressions considérables, ce qui allait se traduire par une détérioration rapide des infrastructures de recherche des universités.
M. Martin a cependant répliqué aux nombreuses critiques, y compris de la part de l'ACPPU qui avait souligné que le volet en espèces disparaîtrait inévitablement au tournant du prochain siècle. Il a donc annoncé l'imposition d'un seuil de 11 milliards de dollars en espèces au-dessous duquel le Transfert ne pourrait baisser.
Les problèmes du FPE et du TSCPP
L'administration du FPE manquait de transparence et d'imputabilité : qui était responsable de quoi? Le gouvernement fédéral ou les provinces? La création du TCSPP n'a pas résolu ce dilemme.
Les mesures budgétaires passées et présentes permettent tant au gouvernement fédéral qu'aux gouvernements provinciaux d'agir de manière politiquement irresponsable. Chaque palier a invoqué la complexité et le caractère secret du FPE et, aujourd'hui, du Transfert, pour attribuer à l'autre la responsabilité des restrictions financières et du manque de stratégie politique.
De fait, l'ACPPU estime que la crise du sous-financement des universités est en partie directement attribuable à cette éternelle confrontation entre les paliers de gouvernement.
Même si les provinces devaient dépenser les deniers publics selon leur bon vouloir, les paiements de transfert étaient réservés aux soins de santé et à l'enseignement postsecondaire. De plus, le ministère des Finances a calculé la part revenant respectivement à la santé et à l'enseignement postsecondaire.
On a toujours soutenu que les provinces avaient l'obligation morale de dépenser ces crédits au titre de la santé et de l'enseignement postsecondaire. Il n'en est plus question avec le Transfert car on ne fait plus de distinction entre les programmes. On a en plus ajouté le Régime d'assistance publique du Canada.
Lors des audiences publiques du Comité des finances en 1995, des témoins ont fait valoir qu'il y aurait lieu de diviser les transferts en espèces dans le cadre du Transfert en trois composantes, l'une pour les soins de santé, l'une pour l'enseignement postsecondaire et l'autre pour l'assistance sociale.
Dans le rapport du comité rendu public en janvier 1996, la majorité libérale s'est prononcée contre cette solution. «Le gouvernement aurait beaucoup moins de moyens de pression pour imposer des objectifs nationaux si l'on créait trois entités de transferts monétaires en baisse, chacune axée sur un programme précis. Cela entraînerait une forte réduction des fonds dont le gouvernement ne peut se servir, par exemple, pour faire respecter les dispositions de la Loi canadienne sur la santé, comme il l'a fait récemment en Alberta, et les conditions d'admissibilité des non-résidents à l'assistance sociale comme ce fut le cas en Colombie-Britannique.
Nous pourrions aussi demander ce qu'il en est de l'enseignement postsecondaire.
Faire rapport sur le Transfert
Dans le seizième rapport du Comité permanent des finances, la majorité libérale recommande que le gouvernement fasse rapport chaque année au Parlement quant aux dépenses au titre du transfert. L'ACPPU est d'accord avec cette recommandation. M. Martin, pourtant, a refusé jusqu'à ce jour d'y donner suite.
Les principes et les objectifs du Transfert
Voici ce que prévoyait la partie V du projet de loi C-76 en 1995 :
13.(3) Le ministre du Développement des ressources humaines invite les représentants de toutes les provinces à se consulter et à travailler ensemble en vue d'élaborer, par accord mutuel, un ensemble de principes et d'objectifs communs à l'égard des autres programmes sociaux visés à l'alinéa (1)d) qui pourraient caractériser le Transfert.
Les autres programmes sociaux visés étaient l'enseignement postsecondaire et l'assistance sociale. Sauf erreur, la «consultation et le travail commun» ont été plutôt rares au cours de la dernière année.