Il y a quelques années, le gouvernement fédéral a réduit de façon importante les transferts aux provinces pour la santé, l'enseignement postsecondaire et l'aide sociale. Malgré les augmentations récentes, ces transferts ne sont pas revenus à leur niveau de 1994-1995.
Au même moment les gouvernements provinciaux réduisaient leurs subventions aux universités et permettaient à celles-ci d'augmenter considérablement les frais de scolarité. Les frais de scolarité moyens pour les étudiants du 1er cycle en arts, à la grandeur du Canada, ont augmenté de plus de 90 % au cours des huit dernières années, soit de 1 644 $ en 1990 à 3 179 $ en 1998. Les variations sont considérables d'une province à l'autre, allant d'une hausse de 52 % en Colombie-Britannique à 113 % en Ontario en huit ans.
Pendant la même période, le coût de la vie calculé selon l'Indice des prix à la consommation, a grimpé de 16,7 %. Pour répondre à la demande accrue de prêts étudiants, le gouvernement fédéral augmentait il y a quelques années le montant maximum permis d'un prêt étudiant. Mais cette mesure, bonne en soi, a eu un effet pervers.
Conjugués à la hausse des frais de scolarité et des autres dépenses étudiantes, à des emplois moins bien rémunérés et à un taux de chômage élevé, les étudiants ont commencé à s'endetter davantage. La situation s'est aggravée du fait que le gouvernement fédéral n'a pas un régime fédéral de bourses d'études accordées uniquement selon les besoins financiers des étudiants(e)s. En combinant ces facteurs, on obtient une dette d'études moyenne de 25 000 $ actuellement à la diplomation, soit presque le triple de la dette moyenne en 1990, qui atteignait 9 000 $. Selon la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants, les étudiants d'ici sont parmi les plus endettés au monde. Face à un marché du travail où les emplois sont de plus en plus aléatoires, l'importante dette d'études posera de sérieux problèmes aux diplômés des prochaines années.
C'est dans ce contexte qu'apparaît le phénomène du défaut de remboursement des prêts d'étude. Les établissement financiers insinuent qu'il y a de plus en plus de personnes qui ne remboursent pas leurs prêts d'étude. Il est à noter que depuis 1995, les statistiques ayant trait au défaut de remboursement sont compilées par les établissements financiers, lesquels refusent de les rendre publiques.
Cela est dû à de multiples causes. Parmi celles-ci notons le montant même de la dette d'étude. Celui-ci peut être tellement élevé que le diplômé ne peut rembourser sa dette. Une autre cause possible est un revenu insuffisant après les études, surtout si le diplômé est en chômage ou s'il occupe des emplois volatils. Il a aussi été démontré que la non-obtention d'un diplôme représente un facteur important influant sur la probabilité du défaut de remboursement.
L'information aux étudiants est un autre facteur important. Plusieurs sont mal informés quant au programme de prêt. Par exemple, un tiers seulement des emprunteurs étudiants connaissent le Régime canadien d'exemption d'intérêts. De plus, il semblerait que les institutions financières prêtant aux étudiants auraient un rôle important à jouer dans le phénomène du défaut de remboursement.
Finalement, le type d'établissement d'enseignement jouerait un rôle. L'étude d'envergure de Gross Gilroy menée au Canada signalait qu'avec un revenu constant après les études, les étudiants de niveau collégial présentaient des défauts de remboursement supérieurs de 15 points de pourcentage à ceux du niveau universitaire, et ceux des étudiants ayant fréquenté un institut de formation professionnelle comptaient encore 10 points de pourcentage de plus.
Certains gouvernements et certaines institutions financières voudraient rendre les établissements d'enseignement responsables des défauts de remboursement et envisage même de «punir» ceux dont le taux de défaut de remboursement dépasserait un certain seuil. Une des «punitions» serait de radier un établissement de la liste d'agrément. Notons que la liste d'agrément est tout simplement la liste des établissements, publics et privés, dont les étudiants peuvent bénéficier d'un prêt. On dit que ces établissements sont agréés ou désignés.
Suite à ces développements, plusieurs organisations dont l'ACPPU ont fait des pressions pour une consultation sur le défaut de remboursement et sur la procédure d'agrément ou de désignation.
Le gouvernement fédéral a répondu en organisant un Groupe de travail sur l'agrément et les défauts de remboursement. Ce groupe de travail est composé de représentants du gouvernement fédéral, des provinces et des associations, dont l'ACPPU, oeuvrant dans le secteur postsecondaire.
Il s'est réuni au mois d'avril durant deux sessions intensives de deux jours chacune. Malheureusement durant ces réunions, on a eu tendance à blâmer les institutions postsecondaires et les étudiant(e)s pour les problèmes reliés au non-remboursement de prêts d'études. Au cours de ces réunions, les porte-parole du gouvernement ont toujours nié que les causes de ce problème n'avaient aucune implication gouvernementale.
Lors de ces rencontres, le délégué de l'ACPPU, avec les représentants des organisations oeuvrant dans le secteur public de l'enseignement postsecondaire a fait valoir que radier un établissement public de la liste d'agrément équivalait à la peine de mort pour cet établissement, et que la responsabilité du défaut de remboursement reposait sur de nombreux acteurs dont les étudiants, les gouvernements, les institutions financières prêteuses et finalement les établissements d'enseignement.
Un expert a été chargé de faire un rapport synthèse des efforts du groupe de travail, mettant en évidence les points d'accord (ils sont nombreux) et ceux où les parties se sont entendues pour être en désaccord.
Le rapport sera publié au milieu de mai et tous les participants pourront faire leurs commentaires à ce moment là. L'ACPPU se propose évidemment d'être encore active à cette étape.