Lors de leur conférence annuelle tenue le mois dernier, les premiers ministres des provinces de l'Ouest et les dirigeants des territoires ont fait front commun pour revendiquer le rétablissement des 3,7 milliards de dollars retranchés des paiements de transfert fédéraux. Dans la foulée des récentes largesses de M. Martin qui a réinjecté 2,5 milliards de dollars dans le régime de santé, les premiers ministres ont démontré qu'il était désormais prioritaire d'obtenir du fédéral des fonds pour l'enseignement postsecondaire.
Bien qu'il n'existe aucun mandat clair pour l'affectation de crédits au titre de l'enseignement postsecondaire, de la santé et de l'assistance sociale, il était manifeste que les premiers ministres voulaient le rétablissement des 6,2 milliards de dollars que l'infâme budget de Mulroney avait soustraits en 1995.
Le dernier budget fédéral a omis l'enseignement postsecondaire et les gouvernements provinciaux se sont engagés à augmenter leurs dépenses dans le secteur de la santé. Le premier ministre du Manitoba, Gary Filmon, a déclaré : «Nous estimons que nous pouvons faire la même chose pour l'enseignement postsecondaire si Ottawa s'engage à commencer à rétablir les fonds.»
Les premiers ministres de l'Ouest et les dirigeants des territoires ont dit qu'ils feraient valoir leurs revendications à la conférence annuelle des premiers ministres au mois d'août.
Il y a plus d'un an, Paul Martin a confirmé que le gouvernement fédéral se retirait de son engagement traditionnel envers le financement des établissements d'enseignement postsecondaire et qu'il mettait de l'avant des mesures devant alléger le fort endettement des étudiants et encourager les économies personnelles en vue des études. Toutefois, au dire de tous, le projet des bourses du millénaire s'est révélé beaucoup moins utile que prévu et a irrité les provinces qui voulaient des paiements de transfert au lieu d'un programme fédéral servant des buts individuels.
Les universités canadiennes sont déjà énormément désavantagées par rapport aux établissements américains. D'ailleurs, leur situation empire d'année en année alors que les Américains, dans l'ensemble, investissent davantage dans leurs établissements d'enseignement postsecondaire.
Bien entendu, il ne faut pas blâmer entièrement le gouvernement fédéral. Certains gouvernements provinciaux ont commencé à réduire ou à geler le financement des universités avant que le fédéral sable les paiements de transfert. Les crédits versés aux provinces étaient pratiquement inconditionnels et n'étaient assortis d'aucune garantie qu'ils serviraient aux buts visés.
De plus, l'entente intervenue au début de février entre le fédéral et les provinces au sujet des dépenses dans les programmes sociaux est problématique. Les provinces ont effectivement promis de dépenser davantage dans le secteur de la santé si le fédéral augmentait ses paiements de transfert. L'accord d'au moins six provinces est cependant nécessaire pour qu'Ottawa donne suite à cette promesse. Le Québec devrait également se voir garantir un droit de retrait des conditions de l'entente fédérale-provinciale.
Selon l'entente de février, chaque province pourrait élaborer ses propres normes en fonction de ses besoins et de sa situation. Le récent rapport du Conseil des ministres de l'Éducation a semblé mettre en évidence le manque de normes nationales. De fait, les besoins et la situation des provinces varient beaucoup entre elles de sorte que les niveaux et les choix de financement d'une province à l'autre sont très peu homogènes.
Bien que les dépenses par habitant en Colombie-Britannique au titre de l'éducation sont demeurées relativement constantes, en Alberta, elles ont chuté de 22 p. 100 en dollars réels depuis 1993-1994. L'Ontario, où l'on s'attend à ce que le nombre d'inscriptions augmente de 40 p. 100 au cours des dix prochaines années, arrive bon dernier quant au financement par étudiant. Le rapport étudiants-professeur y est d'ailleurs le plus élevé au Canada.
Avant la conférence des premiers ministres en août, l'ACPPU intensifiera ses pressions sur Ottawa et les provinces en faveur de l'augmentation du financement de base des universités canadiennes et de l'élaboration de solides normes nationales pour l'enseignement postsecondaire assurant le maintien de la qualité et de l'accessibilité.
L'ACPPU propose la création d'un fonds pour l'enseignement postsecondaire régi par une loi sur l'enseignement postsecondaire qui énonce les responsabilités des gouvernements fédéral et provinciaux, qui détermine les normes, qui promulgue des mécanismes de mise en application. Le fonds devrait rétablir les paiements de transfert fédéraux en espèces de 2,5 milliards de dollars qui ont été retranchés depuis 1993-1994, et devrait croître avec l'économie.
L'enseignement public doit rester public : il doit être financé par les deniers publics et être accessible à toute la population. Il faut mettre un frein au mouvement en faveur du financement privé et des établissements d'enseignement privé.
Traduit de l'article «Western Premiers Want Funding Restored».