L'ACPPU demande au gouvernement de mettre au rancart le rapport du Groupe d'experts sur la commercialisation des résultats de la recherche universitaire. «Ce rapport est sérieusement vicié», a affirmé le président de l'ACPPU, Bill Graham. «Nous conseillons fortement au gouvernement fédéral de mettre sur pied un nouveau groupe d'experts, mieux équilibré, pour réexaminer les questions très importantes reliées à la commercialisation de la recherche.»
«La composition de ce nouveau groupe d'experts doit cependant représenter un large éventail d'intervenants du milieu, dont des chercheurs oeuvrant présentement dans des universités et provenant de diverses disciplines et traditions», a déclaré M. Graham à Tom Brzustowski, président du CRSHG et directeur des consultations publiques pour le rapport du Groupe d'experts.
Dans son commentaire, l'ACPPU a souligné que le bien commun de la société dépendait du fait que les universités sont des lieux qui encouragent la quête du savoir et sa libre présentation. Toutefois, selon la trésorière de l'ACPPU, Shirley Mills, la liberté de rechercher des connaissances est toujours mise en péril par ceux qui placent leurs intérêts devant l'intérêt public et, pire, par ceux qui définissent leurs intérêts comme étant de l'intérêt public. Mme Mills ainsi que M. Graham et Ken Field, un membre du Comité de direction, ont rencontré M. Brzustowski le 5 octobre.
Face à de considérables compressions des deniers publics, les universités et les gouvernements se tournent de plus en plus vers le secteur privé pour obtenir du financement. Or les bailleurs de fonds veulent diriger la recherche pour qu'elles servent leurs fins, comme les représentants de l'ACPPU l'ont signalé à M. Brzustowski. «Cette tendance menace non seulement l'intégrité intellectuelle des professeurs et des chercheurs universitaires, mais elle va aussi à l'encontre de l'intérêt public plus général puisque la recherche fondamentale et non ciblée est à l'origine de la plupart de nos acquis socio-économiques», a ajouté M. Graham.
Il a également cité John Polanyi, lauréat du prix Nobel et professeur à l'Université de Toronto, qui a critiqué les tentatives du secteur privé de diriger la recherche : «Il est déjà assez difficile de faire des découvertes. Je ne sais pas comment produire des découvertes sur mesure pour un secteur industriel en particulier.»
Pour la délégation de l'ACPPU, il n'est pas surprenant que le rapport n'ai pu refléter une compréhension des vrais problèmes de la recherche universitaire et des questions cruciales touchant la commercialisation puisque le Groupe d'experts était surtout composé de représentants du secteur privé et ne comptait aucun chercheur ou professeur d'université oeuvrant actuellement dans le milieu.
L'ACPPU a fait part de ses principales préoccupations concernant les recommandations suivantes du Groupe d'experts :
- Que la commercialisation devienne la quatrième mission de l'université, aux côtés de l'enseignement, de la recherche et du service à la communauté;
- Que les universités encouragent la commercialisation en la reconnaissant dans les politiques sur la permanence et l'octroi de promotion;
- Que les professeurs soient tenus de céder à l'université leurs droits sur la propriété intellectuelle qu'ils créent ou de faire cession à l'université de tous leurs droits pour la commercialisation de la propriété intellectuelle;
- Que les universités soient tenues de consacrer sensiblement plus de ressources afin d'augmenter leur capacité de commercialisation, même si les coûts seront plus élevés que les revenus supplémentaires proposés par le Groupe d'experts;
- Que le régime fiscal soit remanié afin d'offrir plus de diminution d'impôt aux riches investisseurs alors que les gouvernements soutiennent que les crédits sont insuffisants pour réinvestir des sommes importantes dans l'enseignement postsecondaire et la recherche.
L'ACPPU a fait remarquer que le rapport ne traite aucunement des questions d'éthique que la commercialisation de la recherche universitaire peut soulever. Pour M. Graham, «cet oubli est éloquent surtout que le Groupe d'experts a effectué ses travaux au milieu de l'affaire Olivieri à l'Université de Toronto et à l'hôpital pour enfants de Toronto.»
«La seule recommandation positive du rapport, celle qui favorise la hausse des investissements publics dans la recherche universitaire, semble être un petit peu plus qu'une façade», a affirmé Ken Field. «Elle reçoit moins d'attention que la demande de baisser les impôts, l'exigence que les universités augmentent leurs efforts de commercialisation, ou les prétendus problèmes qui sont créés en attribuant la propriété intellectuelle aux chercheurs universitaires.»