En décembre, le ministre des Finances Paul Martin a déposé le premier budget officiel du gouvernement en près de deux ans et, ce faisant, a distribué des milliards de dollars pour la défense et la sécurité en vue de contrer le terrorisme.
Au total, le gouvernement prévoit dépenser 7,7 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour renforcer les mesures de sécurité dans les aéroports, embaucher plus d'agents de police et du renseignement, resserrer le contrôle des réfugiés et des immigrants et améliorer la sécurité à la frontière.
« Notre objectif est clair : préserver la sécurité des Canadiens et des Canadiennes, fermer la porte aux terroristes et garder nos frontières ouvertes », a déclaré M. Martin, dans son discours devant la Chambre des communes.
Malgré les nouvelles dépenses, M. Martin prédit que le Canada n'aura aucun déficit. Il sera donc le seul pays du G-7 dont les finances demeureront saines pendant la récession économique actuelle.
De nombreux critiques en sont venus à se demander pourquoi le fédéral ne prend pas davantage de mesures pour éviter que le repli économique ne s'enfonce ou ne se prolonge.
« Malgré les belles paroles sur le maintien de la sécurité économique des Canadiens et Canadiennes, ce budget ne prévoit presque aucune mesure supplémentaire pour stimuler l'économie », a mentionné le Congrès du travail du Canada dans son analyse. « Il n'aide nullement les provinces à payer les frais des services de santé, de l'éducation et de l'aide sociale en ces temps où leurs recettes baissent. Et il ne prévoit guère de stimulation économique. »
Le budget se concentre carrément sur la question de la sécurité. Il prévoit toutefois de l'argent frais pour appuyer la recherche, ce qui comprend un financement ponctuel de 200 millions de dollars destiné aux universités pour les aider à compenser les coûts indirects de la recherche, par exemple l'entretien et le fonctionnement des laboratoires et des bibliothèques et l'administration des subventions.
Robert Giroux, président de l'Association des universités et collèges du Canada, a qualifié les nouvelles dépenses fédérales de « stratégie gagnante » pour le Canada.
« Cela comble un urgent besoin qu'éprouvent les universités canadiennes depuis quelques années. Nous sommes ravis de constater que le gouvernement fédéral s'est engagé à faire du financement constant des frais indirects de la recherche une priorité. »
Selon l'ACPPU, cependant, les fonds uniques pour compenser les frais indirects de la recherche ne régleront pas le principal problème des universités et collèges du pays.
« La réduction des subventions de fonctionnement de base des universités et des collèges est le véritable problème auquel nous faisons face », a déclaré Tom Booth, le président de l'ACPPU. « À cause des coupes sombres dont nous avons été témoins depuis de nombreuses années, les budgets ont été insuffisants pour empêcher la hausse des frais de scolarité ou pour renouveler le corps professoral nécessaire à l'enseignement et à la recherche. »
Il a affirmé que les nouveaux crédits au titre des frais indirects de la recherche pourraient soulager temporairement les budgets de fonctionnement des universités qui ont dû compenser ces coûts. Il a ajouté cependant que les subventions de fonctionnement demeureront bien en-deçà des niveaux antérieurs.
« Un engagement à long terme en faveur du financement de base aiderait davantage le milieu de la recherche que toute autre mesure du gouvernement fédéral », a-t- il soutenu. « Le ministre des Finances doit en toute priorité accro”tre les subventions de fonctionnement de base des collèges et des universités. »
Des groupes d'étudiants ont également déclaré que les nouveaux fonds au titre des frais indirects de la recherche rataient la cible.
« Nous avons besoin d'une politique complète en matière de recherche et non pas des programmes ponctuels de financement qui ne font que contourner la crise de l'endettement des étudiants et des frais de scolarité en hausse constante », a déclaré Ian Boyko, président national de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants. « Le budget ne prévoit rien pour freiner l'écart grandissant entre les personnes qui peuvent payer des frais de scolarité exorbitants et celles qui sont laissés pour compte dans l'économie du savoir. »
Le budget 2001 prévoit en outre une hausse de 7 p. 100 des budgets du Conseil de recherches en sciences humaines et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie à compter de l'année prochaine. Cette hausse augmentera le budget du CRSNG de 36,5 millions dollars tandis que celui du CRSH n'augmentera que de 9,5 millions de dollars.
Les personnes qui espéraient que le fédéral saisisse l'occasion pour s'occuper du sous-financement traditionnel des sciences sociales et humaines ont été déçues de cette mince augmentation de l'enveloppe du CRSH.
« Mais l'équilibre est loin d'être atteint », a averti Patricia Clements, présidente de la Fédération canadienne des sciences humaines et sociales. « En fait, l'écart est encore plus important qu'auparavant, alors que les sciences sociales et humaines, déjà sous-financées, ne reçoivent que 11,5 p. 100 du budget total des conseils subventionnaires. »
M. Booth est du même avis et craint que certains programmes du CRSH subissent les conséquences de cette faible hausse. « Les demandes de subventions auprès du CRSH augmentent rapidement. La hausse insuffisante de l'enveloppe annoncée dans le budget se traduira par des réductions de programmes », a-t-il conclu.