Le collège St. Michael's de l'Université de Toronto est vivement critiqué par la population étudiante, le corps professoral et les organismes de santé. Ils veulent que l'école rembourse un don controversé qu'elle a reçu d'une société productrice de tabac.
Il y a deux ans, le collège St. Michael's a accepté une subvention de 150,000 $ de la société Imperial Tobacco pour l'aider à financer un programme sur la responsabilité des sociétés.
" Comment une université peut-elle accepter des fonds immoraux d'une société immorale pour financer un programme en éthique. Cela dépasse l'imagination ", a affirmé Bob Willard, ancien membre du conseil consultatif du programme en éthique d'entreprise dont il a démissionné pour protester contre cette subvention.
Les groupes de lutte contre le tabagisme et les groupes sur la santé publique ont lancé une campagne médiatique visant à enjoindre l'université de rembourser l'argent. Les groupes paient des annonces dans les journaux et à la radio dans lesquelles ils demandent à toutes les universités de rompre leurs liens avec l'industrie du tabac.
" Nous ne comprenons pas pourquoi une université accepte de s'associer avec un grand fabricant de tabac ", a demandé Atul Kapur, président de Médecins pour un Canada sans fumée. " Nous n'avons pas d'autre solution que de demander à l'université de choisir entre embrasser les intérêts de la santé publique ou légitimer une industrie qui a causé la mort de centaines de milliers de Canadiens et Canadiennes. "
" Jusqu'à maintenant, le collège St. Mike's ne voit tout simplement pas la différence ", a soutenu Garfield Mahood, directeur général de l'Association pour les droits des non-fumeurs. " Si les dirigeants du collège suivaient les cours de leur programme en éthique de l'entreprise, ils échoueraient. "
Selon un porte-parole de l'Imperial Tobacco, dont le siège est à Montréal, la société savait que son don servirait à financer le programme sur la responsabilité des sociétés, mais elle l'a offert sans conditions.
Toutefois, Laurent Leduc, un des fondateurs du programme en éthique et un des membres du corps professoral, a confié qu'un plan de travail, qu'il avait créé d'après une étude de cas portant sur le don fait à une université britannique par un fabricant de tabac, a été refusé après la réception du don de l'Imperial Tobacco.
" On peut interpréter ce refus comme étant relié au financement privé du programme ", a fait remarquer Rhonda Love, présidente du Comité de la liberté universitaire et de la permanence de l'emploi de l'ACPPU et professeure en sciences de la santé publique. " En fait, certaines personnes pourraient dire que l'Imperial Tobacco a acheté le silence. Cela soulève de graves questions de liberté universitaire. "
Richard Alway, directeur du collège St. Michael's, a insisté pour dire que le don n'avait pas influencé la conception ou le contenu du programme. Il a ajouté que le collège a depuis mis sur pied un comité chargé d'examiner tous les dons pour éviter les conflits d'éthique possibles.
" À l'évidence, ce domaine suscite des opinions diverses et tranchées ", a-t-il ajouté.
Il n'y a rien d'étonnant à ce que les groupes étudiants critiquent le don, car ils craignent qu'il ait une influence sur le programme.
" L'ingérence des sociétés dans le programme d'études nous préoccupe, nous, les étudiants ", a déclaré Rocco Kusi-Achampong, qui préside le conseil administratif étudiant de l'Université de Toronto.
Bruce Buchanan, fonctionnaire à la retraite du ministère de la Santé de l'Ontario et ancien étudiant de l'Université de Toronto, demande à toutes les universités de cesser d'investir dans les sociétés productrices de tabac ou d'accepter des fonds de celles-ci.
" Les universités doivent se vouer à la quête de la vérité en sciences ", soutient-il. " Mais des millions de pages de documents publics montrent que l'industrie du tabac a supprimé la vérité et a sapé l'objectif scientifique. À vrai dire, ses campagnes de désinformation ont entraîné le décès prématuré de milliers de Canadiens et Canadiennes. Un établissement d'enseignement qui se voue sérieusement à la découverte de la vérité devrait avoir la nausée à la pensée d'accepter de l'argent provenant de cette source. "