L'ACPPU s'est jointe à un grand nombre d'organismes qui mettent en doute le projet de loi du gouvernement fédéral, le projet de loi C-17 ou la Loi sur la sécurité publique.
Comparaissant devant le comité parlementaire spécial mis sur pied pour examiner la projet de loi C-17, le directeur général de l'ACPPU, James Turk, a présenté une critique générale de la loi proposée.
Il a félicité d'autres groupes, entre autres l'Association du Barreau canadien, qui a fait une critique excellente et minutieuse des conséquences légales du projet de loi C-17.
Il a dit au comité que l'ACPPU commenterait le projet de loi dans le contexte historique et politique de la législation sur la sécurité nationale, alors que la sécurité relègue souvent la liberté au second rang.
Le mémoire de l'ACPPU a insisté sur le phénomène de " déviation de la finalité ", une tendance de la législation sur la sécurité nationale à lancer invariablement un filet beaucoup plus large et interventionniste que ce qui avait été envisagé au départ, quels que soient ses buts déclarés.
De l'avis de M. Turk, les auteurs des attentats du 11 septembre ont atteint leurs objectifs si les états démocratiques sapent leur propre légitimité et leurs appuis en réagissant de manière excessive à la violence par l'entremise de lois trop restrictives.
Il a mentionné un article du projet de loi qui est particulièrement inquiétant, soit celui qui permettrait de passer au crible les manifestes des passagers aériens qui posent une menace à la sécurité du transport. Le projet de loi C-17 permettrait à la GRC de comparer le manifeste de passagers à une liste plus générale de personnes recherchées en raison d'un mandat non exécuté pour une infraction au code criminel qui n'a rien à voir avec la sécurité des transports.
" Il s'agit d'un prétexte nouveau et grave d'ingérence dans la vie privée des Canadiens et Canadiennes ", a déclaré M. Turk.
De plus, a-t-il ajouté, bien qu'il soit légitime de vouloir assurer la sécurité des avions, il est inacceptable de conserver des listes de passagers pendant sept jours et de permettre aux forces policières de scruter ces listes pour des motifs n'ayant aucun rapport avec la sécurité des avions et l'antiterrorisme.
" Même si les motifs antiterroristes sont obtus, d'autres questions entre en jeu, comme la stigmatisation raciale, les fausses concordances, les erreurs de saisie des données et la manière dont est dressée en tout premier lieu la liste de personnes qui constituent une menace ", a-t-il affirmé.
D'autres organismes ont fait écho aux préoccupations de l'ACPPU, notamment la British Columbia Civil Liberties Association et le Congrès du travail du Canada.
L'Association du Barreau canadien, qui représente 38 000 avocats à la grandeur du pays, a condamné le projet de loi C-17 et la législation qui l'accompagne. L'ABC a déclaré au comité que la législation entraînerait le Canada vers un état policier.
Le député Garry Breitkreuz, de l'Alliance canadienne, a accueilli favorablement le mémoire de l'ACPPU.
" Le problème est que de nombreuses personnes ne se rendent pas compte de l'importance des droits à la vie privée dans une société libre et démocratique ", a-t-il signalé.
Toutefois, le député libéral Steve Mahoney a réprouvé l'ACPPU, estimant qu'il serait absurde de limiter les pouvoirs policiers généraux du projet de loi si ces nouveaux pouvoirs de recherche devaient permettre l'arrestation d'une personne recherchée pour un meurtre sans lien avec le terrorisme.
" Nous ne pouvons tout simplement pas permettre à quelqu'un de se sauver ", a-t-il soutenu.
" On peut toujours invoquer ce genre de moyen sensationnel pour justifier la violation des libertés civiles fondamentales ", a réfuté Jim Turk. " Nous avons choisi, en tant que société démocratique, de nous préparer à composer avec certains risques afin de protéger les caractéristiques fondamentales des libertés civiles de notre société.
" Nous ne permettons pas aux forces policières de se livrer à des expéditions de pêche - elles ne peuvent aller faire un tour chez vous ou à votre bureau pour chercher des choses, elles ne peuvent demander des listes. Ce sont des valeurs historiques auxquelles nous avons attaché de l'importance. Je pense qu'il est très dangereux de vouloir y renoncer trop rapidement au nom de l'antiterrorisme. "
Le député du Bloc québécois, Mario Laframboise, a dit que la déclaration de M. Turk touchait à l'essentiel et a félicité l'ACPPU pour son mémoire, qui rejoint les préoccupations de l'Association du Barreau canadien et du Commissaire à la vie privée.
Le mémoire de l'ACPPU soumis au comité est affiché à www.caut.ca/english/publications/briefs/default.asp.