Dans un arrêt du 4 mars dernier, la Cour suprême du Canada a statué que la photocopie de documents publiés à des fins de recherche personnelle est protégée en vertu des principes d'utilisation équitable de la Loi sur le droit d'auteur.
En 1993, CCH Canadienne Limitée, Canada Law Book Inc. et Carswell Thomson Professional Publishing ont déposé des actions contre le Barreau du Haut-Canada alléguant que le service de photocopie de ce dernier violait leurs droits d'auteur. Le Barreau produit aux usagers de sa bibliothèque de Toronto une seule copie d'extraits de sa collection d'oeuvres juridiques, dont certaines étaient publiées par les trois éditeurs. Les tribunaux inférieurs partageaient l'opinion des éditeurs.
La Cour suprême a toutefois infirmé les décisions en faisant valoir que l'utilisation des oeuvres des éditeurs par le Barreau, dans le cadre du service de photocopie, était " axée sur la recherche et équitable ". Selon la Cour, " il faut interpréter le mot "recherche" de manière large afin que les droits des utilisateurs ne soient pas indûment restreints ".
Le président du Comité des bibliothécaires de l'ACPPU, Chris Dennis, a fait bon accueil à cet arrêt-clé pour les utilisateurs.
" Le Barreau perdait par deux points. Mais à la fin de la journée la Cour suprême, en trouvant un juste équilibre, a remporté la victoire. La Cour a récemment souligné que l'équilibre se trouve au coeur de la Loi sur le droit d'auteur, les droits du titulaire étant tout aussi importants que ceux de l'utilisateur. "
La Cour considère que les exceptions relatives à l'utilisation équitable en matière de droit d'auteur servent l'intérêt public en général et qu'elles ne devraient pas être interprétées de façon restrictive.
" Il est important de dire que le flux de l'information au Canada est régi par des considérations plus que commerciales ", déclare M. Dennis. " La Cour a déclaré que l'objet du droit d'auteur n'est pas simplement d'optimiser les profits des éditeurs mais celui aussi de s'assurer que le public obtient l'accès raisonnable aux oeuvres, y compris le droit de reproduire sans autorisation dans certaines situations. Dans la culture des bibliothécaires et des universitaires, la diffusion du savoir passe avant l'intérêt privé. "
M. Dennis fait observer que l'arrêt n'accorde pas automatiquement le droit de reproduire à volonté.
" Le Barreau a eu gain de cause notamment parce qu'il s'est montré très prudent dans sa définition de ce qui pouvait être photocopié pour les clients. L'utilisateur n'a pas le champ absolument libre. L'utilisation raisonnable se limite à une seule copie de ce qui constitue, dans la plupart des cas, un extrait d'une oeuvre, et celle-ci doit être utilisée à des fins de recherche, d'étude privée, de critique, de compte rendu ou de communication de nouvelles. "
De plus, il prévient que la lutte visant à trouver l'équilibre entre les utilisateurs et les titulaires d'oeuvres protégées n'est pas terminée.
" Les grands éditeurs, fort mécontents de l'arrêt, exerceront vraisemblablement d'énormes pressions sur le Parlement pour défaire le juste équilibre de la Loi sur le droit d'auteur. La communauté universitaire doit intervenir ici afin de préserver une loi qui sert les intérêts de tous les Canadiens. "