L'indépendance et l'intégrité de l'enseignement de la médecine et de la recherche médicale au Canada sont en péril, car trop de professeurs de clinique ne jouissent pas de la même liberté académique et des mêmes droits en matière d'emploi que leurs homologues hors clinique, prévient le rapport diffusé le mois dernier par un groupe de travail constitué de spécialistes médicaux et formé par l'ACPPU.
Sur la photo, de gauche à droite : Gordon Guyatt, Alan Jackson, Philip Welch, Carol Cass et Derryck Smith, Groupe de travail de l'ACPPU sur la liberté académique des professeurs qui travaillent dans des établissements de soins affiliés à des universités.
Le rapport À la défense de la médecine : Les professeurs de clinique et la liberté académique conclut que la liberté des professeurs de clinique de contester les conceptions orthodoxes prédominantes ou de critiquer les décisions prises dans leurs établissements est de plus en plus vulnérable aux pressions de groupes d'intérêt extérieurs, d'administrateurs universitaires et de bailleurs de fonds gouvernementaux.
« Il s'agit d'une période d'importance cruciale pour les professeurs de clinique », soulignent les auteurs du rapport. « L'insuffisance du financement a exercé une pression importante sur les universités et les établissements de soins de santé. Les administrations se sont ajustées en mettant sur pied des structures de gestion de plus en plus hiérarchisées, qui optimisent l'efficacité ponctuelle à court terme mais compromettent la pérennité de la médecine universitaire. Les pressions en vue de produire un revenu clinique obligent à investir du temps au détriment de l'enseignement et de la recherche. Les incitatifs à la création de produits commercialisables placent à l'avant-plan les considérations d'ordre économique plutôt que les considérations scientifiques et éthiques. Les universités et les établissements de soins de santé affiliés s'affaiblissent à mesure que s'érode le terrain de la liberté de pensée, d'action et d'étude critique, les choses mêmes qui font progresser la quête humaine de connaissance. »
Selon Derryck Smith, directeur de la division de pédopsychiatrie et de psychiatrie de l'adolescent à l'Université de la Colombie-Britannique et coauteur du rapport, des changements s'imposent si l'on veut protéger la santé des Canadiens.
« Il est primordial pour les chercheurs que leurs travaux soient libres de toute entrave. C'est particulièrement important en l'occurrence parce que les résultats ont des conséquences sur la santé des patients et des populations », a déclaré le docteur lors d'une entrevue.
« Le problème pour les professeurs de clinique, c'est qu'ils sont souvent pris au beau milieu de trois systèmes différents : l'université, l'hôpital et l'institut de recherche. Ajoutez-y l'influence de l'industrie pharmaceutique et vous obtenez un mélange potentiellement toxique de pressions qui s'exercent sur les professeurs individuels. »
Le groupe de travail soutient qu'il importe de prévoir des mécanismes de protection explicites de la liberté académique des professeurs de clinique dans tous les contrats de travail. De plus, les professeurs de clinique doivent avoir un meilleur accès à des méthodes équitables et indépendantes de résolution des différends, y compris l'accès à un mécanisme d'arbitrage indépendant externe autre que celui prévu par règlement.
Le groupe de travail souligne également que les professeurs de clinique doivent mettre sur pied des organismes représentatifs efficaces pour les aider à défendre leurs droits au sein des universités, des établissements de soins de santé et des régimes de financement cliniques.
Les auteurs prévoient de visiter les facultés de médecine de toutes les universités canadiennes pour y discuter avec les professeurs de clinique membres des questions abordées dans le rapport. Ils rencontreront également les représentants des sociétés médicales provinciales et d'autres groupes qui s'intéressent à l'étude.
La version intégrale du rapport est disponible ici (en format .pdf).