S'il est maintenant largement admis qu'un enseignement postsecondaire abordable, accessible et de qualité supérieure est essentiel au développement des nations, il n'en demeure pas moins que les gouvernements au Canada tardent à placer les universités et les collèges au rang des priorités. Au lieu d'une approche coordonnée entre Ottawa et les provinces, nous nous retrouvons en présence d'une mosaïque de programmes et de mesures disparates qui n'ont pas réussi jusqu'ici à s'attaquer aux vrais problèmes des étudiants, du personnel et de nos établissements. Certains signes donnent cependant à penser que ces problèmes deviennent trop évidents pour que l'on continue à les ignorer.
Le mois dernier, la sénatrice libérale Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard, a lancé un appel pour que le gouvernement entre- prenne une enquête spéciale sur l'avenir de l'enseignement postsecondaire au Canada. En présentant sa motion, la sénatrice a déploré que de plus en plus de jeunes Canadiens soient forcés d'hypothéquer leur avenir afin d'acquérir les connaissances et les compétences que réclament actuellement le marché du travail. Et elle a indiqué clairement que les problèmes auxquels nous sommes confrontés découlent directement du manque de leadership et de vision dont fait preuve le gouvernement fédéral.
« Les gouvernements fédéraux successifs ont poursuivi un rôle de soutien indirect non interventionniste au moyen de transferts fiscaux aux provinces, de financement de recherche et de développement pour les universités, du Programme canadien de prêt aux étudiants, ainsi que par d'autres moyens limités comme les bourses, les subventions et les initiatives d'épargne », a déclaré la sénatrice Hubley. « Bien que ce soit le rôle fédéral sûr et traditionnel, respectueux de la primauté des compétences provinciales en éducation, c'est aussi un rôle qui, selon moi, manque de force et de vision. Ce rôle est incapable d'apporter le leadership nécessaire pour réaliser pleinement notre promesse nationale en matière d'enseignement supérieur. »
Ces paroles sont encourageantes de la part d'une politicienne fédérale. L'ACPPU soutient depuis longtemps qu'Ottawa doit jouer un rôle plus actif dans le secteur de l'enseignement postsecondaire. Dans le mémoire que nous avons présenté au comité des finances en novembre dernier, nous proposions que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, adopte une loi sur l'enseignement postsecondaire. Établie sur le modèle de la Loi canadienne sur la santé, cette loi viserait à fournir des fonds stables à long terme aux provinces et à assurer une plus grande transparence sur la façon dont sont dépensés les fonds fédéraux.
La sénatrice Hubley reconnaît qu'il est temps que le gouvernement fédéral fasse de l'enseignement postsecondaire une priorité immédiate. Elle demande au Sénat de lancer une enquête sur la façon dont le gouvernement fédéral peut garantir que les universités et les collèges reçoivent le financement adéquat et sont accessibles à tous les étudiants qualifiés.
J'espère que cette enquête amorcera un débat national depuis longtemps nécessaire sur le type de système d'enseignement postsecondaire dont nous avons besoin et que nous voulons pour le XXIe siècle. À un moment où même le gouvernement fédéral reconnaît que près des trois quarts de tous les nouveaux emplois créés exigent en partie de leurs titulaires des études postsecondaires, nous devons faire davantage pour élargir l'accès aux universités et aux collèges.
À mon avis, nous devons revoir notre façon de penser et modifier la définition de l'enseignement public de base au Canada. Au cours du siècle dernier, nous avons reconnu que l'obtention d'un diplôme d'études secondaires était important à tel point que nous avons décidé d'implanter la gratuité des études secondaires. Aujourd'hui, je pense que l'obtention d'un grade ou d'un diplôme collégial ou universitaire équivaut à ce que représentait dans le passé le diplôme d'études secondaires. En admettant que l'enseignement public de base se situe au niveau universitaire et collégial, nous devons, bien sûr, être disposés à souscrire publiquement à ce principe et à en faire un droit fondamental universel.