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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

avril 2005

L'ACPPU demande à McMaster de faire marche arrière

L'ACPPU a demandé à l'Université McMaster d'abolir la politique de cet établissement qui menace la liberté académique. En effet, adoptée par le sénat de McMaster en 2003, cette politique interdit aux membres du corps universitaire de faire mention de leur affiliation à l'Université McMaster lorsqu'ils expriment devant les médias une opinion qui échappe à leurs compétences universitaires ou à leurs domaines de spécialisation.

L'ACPPU appuie sa revendication sur les conclusions du rapport d'un comité spécial chargé en décembre 2003 de mener une enquête sur les lignes directrices de l'Université McMaster. Selon le rapport rédigé par William Bruneau, professeur émérite de théorie de l'éducation à l'Université de la Colombie-Britannique, et par Ted Hannah, professeur de psychologie à l'Université Memorial de Terre-Neuve, la politique de McMaster « serait perçue comme une atteinte inacceptable à la liberté académique dans tous les autres collèges ou universités du Canada ».

Le rapport soutient que les universitaires ont l'obligation et la responsabilité de participer activement et vigoureusement aux débats publics. « La crédibilité est une composante essentielle du débat, de même que l'affiliation universitaire d'un professeur est un aspect de la crédibilité de celui-ci en tant qu'intellectuel public », poursuit le rapport. « Il devrait être possible en tout temps, voire souhaitable dans bien des cas, de faire mention de son affiliation. »

Selon le directeur général de l'ACPPU, James Turk, la seule restriction à laquelle l'ACPPU souscrit depuis longtemps est celle qui interdit aux membres du personnel académique de parler au nom de leur établissement, à moins d'en être expressément autorisés. Il précise toutefois que cette restriction ne pose pas problème dans l'affaire McMaster.

Bien que les dirigeants de l'Université McMaster aient signalé au comité d'enquête qu'ils pourraient difficilement concevoir un cas où la politique de l'établissement s'appliquerait, ils ont insisté sur l'importance de la maintenir en vigueur.

Plusieurs membres du corps professoral de McMaster ont exprimé une vive inquiétude auprès de l'ACPPU au sujet de la politique depuis son adoption.

Le professeur David Hitchcock a rapporté avoir reçu une lettre dans laquelle l'administration de l'université lui conseillait de tenir compte de la politique. Les dirigeants de l'université ont noté que le professeur Hitchcock, dans un message adressé aux résidents de son quartier municipal pendant la campagne électorale municipale de novembre 2003, mentionnait parmi ses affiliations son poste de professeur de philosophie à l'Université McMaster.

« Une lettre du vice-recteur, quel que soit le ton neutre qu'elle puisse adopter, sera accueillie avec inquiétude », souligne le rapport. « Quels qu'en soient la portée ou les implications, aussi «minimes» soient-elles, un document de cette nature représente une menace pour la liberté académique, surtout s'il amène une personne à bien réfléchir à ce qu'il ou elle écrit ou dit. »

Même si la disposition en cause de la politique de l'Université McMaster est suivie de la mention selon laquelle elle « n'est destinée d'aucune façon à restreindre la liberté académique ou la liberté d'expression des universitaires », la portée de la limite imposée, soutient le rapport, pourrait constituer précisément une telle restriction.

Le comité formule trois recommandations dans son rapport. Il demande instamment au sénat de l'Université McMaster de supprimer la disposition en cause de ses lignes directrices régissant les relations avec les médias. Il presse également l'administration et l'association de professeurs de lancer une campagne d'information publique « en vue d'assurer tous les membres du corps professoral de l'Université McMaster qu'ils jouissent de la pleine protection de la liberté académique dans la vie publique qu'ils poursuivent en tant que communicateurs assurant la liaison entre l'université et les médias et entre l'université et la société en général qu'elle dessert ».

Enfin, le comité recommande que l'ACPPU rende publics les conclusions et les arguments du comité de sorte à dissuader les autres établissements d'adopter des politiques semblables.

Le rapport du comité peut être téléchargé à www.caut.ca. Il est disponible en anglais seulement.