L'ébauche finale des lignes directrices internationales destinées à surveiller la qualité de l'enseignement postsecondaire dispensé à l'extérieur des frontières a été rendue publique le mois dernier dans un climat de controverse qui perdure toujours.
Élaborées conjointement par l'UNESCO et l'OCDE, les lignes directrices sur l'assurance qualité ont apparemment pour objet de protéger les étudiants contre le nombre croissant de fournisseurs peu scrupuleux et d'usines à diplômes qui sont exploitées dans le monde à l'heure actuelle. Les critiques, par contre, avancent que ces lignes directrices visent également à faciliter le commerce des services d'enseignement supérieur par le biais d'accords commerciaux comme l'Accord général sur le commerce des services.
Selon David Robinson, directeur général associé de l'ACPPU, « les règles de l'AGCS servent à promouvoir le libre échange des services tel que l'enseignement en garantissant l'accès aux marchés à tous les prestataires ».
« Vu la prolifération des usines à diplômes qui opèrent actuellement dans le monde, l'on craint que l'ouverture des marchés à toutes les entreprises étrangères d'enseignement supérieur ne prépare la voie à un afflux de prestataires de piètre qualité. C'est l'une des raisons pour lesquelles tant de pays demeurent peu disposés à prendre dans le cadre de l'AGCS des engagements en ce qui a trait aux services d'enseignement. »
Les lignes directrices, fait observer M. Robinson, servent maintenant à presser un plus grand nombre de pays à prendre des engagements en matière de services d'enseignement en vertu de l'AGCS.
Lors d'une réunion de la Commission syndicale consultative qui s'est déroulée en mai dernier, le directeur adjoint de l'éducation à l'OCDE, Bernard Hugonnier, a déclaré : « Nous croyons comprendre que les lignes directrices ont une incidence profonde sur les négociations de l'AGCS ».
M. Robinson souligne qu'à la dernière réunion de rédaction des lignes directrices qui s'est tenue en janvier, « M. Hugonnier a soutenu dans un exposé que l'initiative conjointe de l'OCDE et de l'UNESCO n'avait absolument rien à voir avec l'AGCS ».
M. Robinson affirme par ailleurs que l'impact des lignes directrices se fait déjà sentir au Canada. Invoquant le document élaboré par ces deux organisations internationales, le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada a entamé, l'automne dernier, un processus de consultation en vue d'établir un système « pan-canadien » d'évaluation de la qualité des nouveaux établissements et programmes menant à un grade.
« Dans le contexte de la commercialisation de plus en plus marquée des services d'enseignement à l'échelle internationale où les normes et mécanismes d'assurance qualité constituent un important thème de marketing, le Canada sera peut-être dans une position désavantageuse pour attirer les étudiants étrangers et exporter ses programmes vers les autres pays », selon le document de consultation.
« L'assurance qualité se réduit maintenant à un exercice de marketing ou de promotion d'une marque-service », observe M. Robinson. « Ce constat met en lumière une profonde division entre ce que nous, les membres du personnel académique, considérons comme un enseignement de qualité et ce que les rédacteurs des lignes directrices veulent réellement dire. Pour ces derniers, l'assurance qualité concerne avant tout l'accroissement des débouchés. »
M. Robinson souligne la nécessité, selon lui, d'établir des règles pour protéger les étudiants et renforcer la qualité de l'enseignement sur le plan international. « Ces règles, toutefois, contrairement aux lignes directrices préliminaires actuelles et à l'AGCS, doivent reposer solidement sur des valeurs éducatives et non pas sur des objectifs commerciaux. »
L'adoption des lignes directrices sera débattue plus tard cette année à la réunion du comité directeur de l'OCDE et à la conférence générale de l'UNESCO.