Les ministres de l’éducation des 35 pays membres de l’OCDE se sont réunis à Athènes en juin dernier pour discuter de l’avenir de l’enseignement supérieur. Cette tribune s’est déroulée sur fond de manifestations d’étudiants et de professeurs grecs contre une série de propositions gouvernementales visant à démanteler le système public de l’enseignement universitaire en Grèce.
Des milliers de manifestants massés au centre d’Athènes se sont affrontés aux force de l’ordre avant le début de la réunion ministérielle. Devant l’ampleur des mouvements de protestation, les autorités grecques ont dû déplacer la réunion vers une station balnéaire située à 40 kilomètres au sud de la capitale.
Le secrétaire du syndicat national des professeurs d’université, Yanis Maistros, a accusé le gouvernement d’utiliser les discussions de l’OCDE, dans un exercice de relations publiques politiquement motivé, pour rallier des appuis en faveur de ses propositions controversées de réforme du secteur de l’éducation et, entre autres, d’un amendement constitutionnel autorisant la création d’établissements privés d’enseignement supérieur.
« Face aux manifestations qui s’intensifient de jour en jour, le gouvernement tente par tous les moyens possibles de justifier la révision de l’article 16 de la Constitution grecque qui préserve le caractère public des universités en Grèce, garantit leur autonomie et assure leur financement par l’État », soutient M. Maistros.
Les membres du personnel académique ont débrayé le 1er juin pour protester contre les propositions et appuyer les étudiants qui ont occupé la plupart des départements universitaires dans le pays.
Lors de l’ouverture officielle de la réunion ministérielle, le nouveau secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, ancien ministre des Finances du Mexique, a exacerbé la tension existante en appelant à réformer en profondeur le domaine de l’enseignement supérieur.
« L’un des modèles (de l’enseignement supérieur) qui ne fonctionne certainement pas est celui que peu de pays suivent, en particulier en Europe », a soutenu M. Gurria. « Dans ces pays, l’enseignement supérieur est en grande partie financé par des fonds publics, mais ces pays ne disposent pas de ressources adéquates pour faire face aux coûts générés par l’expansion. »
Et plutôt que d’avancer l’argument selon lequel les gouvernements devraient augmenter les financements publics de l’enseignement supérieur, M. Gurria a fait valoir que « les contributions des diplômés aux coûts des études peuvent être une manière efficace d’augmenter les ressources ».
Les propos du secrétaire général ont trouvé un écho dans le communiqué final rendu public par la ministre grecque de l’Éducation qui présidait la réunion.
David Robinson, directeur général associé de l’ACPPU, a été invité à assister à la réunion ministérielle à titre de délégué officiel de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE, l’interface entre syndicats de salariés et l’OCDE.
Dans le cadre d’une tribune qui s’est tenue avec les ministres avant l’ouverture officielle, les représentants du monde des affaires et des syndicats ont été invités à commenter les thèmes de la qualité, de l’équité et de l’efficacité de l’enseignement supérieur.
« Les frais de scolarité plus élevés, l’endettement croissant des étudiants et la privatisation représentent autant d’éléments qui jouent contre l’équité », a déclaré Bob Harris, un porte-parole de la délégation des syndicats, appelant les ministres à « placer l’équité et l’égalité des chances au centre de nos objectifs et de nos systèmes de valeur ».
Dans son allocution, M. Robinson a signalé que la commercialisation croissante de l’enseignement supérieur portait atteinte à la qualité de l’éducation.
« Assurer la qualité de l’enseignement supérieur nécessite également que les gouvernements et les institutions reconnaissent l’importance d’attirer et de retenir du personnel qualifié », a-t-il poursuivi.
La réunion ministérielle a été précédée par une réunion d’experts de l’OCDE, à Sile en Turquie, où les participants ont discuté de divers scénarios sur le futur de l’enseignement supérieur. Invité également à cette tribune, M. Robinson y a présenté un scénario de rechange à l’« université de service public ».
Ce scénario, explique-t-il, place les valeurs académiques au centre de l’université et se caractérise par le financement public, l’intégration de l’enseignement et de la recherche, une garantie absolue de la permanence de l’emploi et de la liberté académique, ainsi que l’équité et l’accès pour tous les étudiants.