Dans le cadre d’une poursuite intentée à la fin du mois dernier, la professeure de cardiologie Gabrielle Horne accuse l’hôpital d’enseignement affilié à l’Université Dalhousie d’avoir délibérément porté de fausses allégations contre elle pour détruire sa carrière.
Ses travaux de recherche sur les causes de l’insuffisance cardiaque, soutenus par d’importantes subventions, ont été suspendus lorsque le chef du service de médecine de la Capital District Health Authority (CDHA) a modifié, en octobre 2002, les privilèges dont elle bénéficiait à l’hôpital, l’empêchant ainsi d’avoir accès aux patients pour conduire ses recherches.
En raison de l’échec des procédures législatives qui auraient dû assurer l’examen de la décision du médecin en chef en temps opportun, la Dre Horne s’est trouvée privée de tout recours pendant plus de quatre ans.
En septembre 2006, la CDHA, après s’être rendu compte que les allégations accusant la professeure de mettre en danger la vie de ses patients n’étaient pas fondées, a immédiatement rétabli ses privilèges sans cesser pour autant de la blâmer pour sa rude épreuve.
La Dre Horne fait valoir que les mesures prises contre elle par l’hôpital ont porté atteinte à jamais à sa réputation et à sa capacité de remettre sur les rails sa carrière de chercheure, après avoir perdu son personnel de laboratoire hautement qualifié, ses subventions de recherche, ses étudiants diplômés et ses stagiaires postdoctoraux.
On ne connaît pas le montant des dommages-intérêts réclamés, mais ceux-ci pourraient atteindre les millions de dollars, selon l’avocat de la Dre Horne, Me Ron Pizzo. Les seuls frais juridiques se chiffrent dans les centaines de milliers de dollars, indique-t-il.
Dans l’exposé de sa demande, la professeure soutient que la CDHA avait l’obligation de protéger sa liberté académique et sa réputation, mais qu’elle a fait le contraire.
Elle affirme de plus que le directeur de la clinique de fonction cardiaque, qui n’est pas nommé dans la poursuite, a tenté par la contrainte de s’associer comme collaborateur à ses projets de recherche. Se heurtant au refus de la Dre Horne, ce directeur aurait présenté plusieurs allégations au chef du service de cardiologie, Blair O’Neill, en novembre 2001, à savoir notamment que la Dre Horne ne s’entendait pas bien avec le personnel infirmier et qu’elle ne respectait pas les protocoles de recherche établis.
Le même type de prétendu harcèlement s’est poursuivi jusqu’en octobre 2002 lorsque le directeur de la clinique de fonction cardiaque a allégué à nouveau que la professeure n’était pas en bons termes avec ses collègues et que ses travaux de recherche présentaient des risques.
Après avoir discuté avec M. O’Neill, le médecin en chef de la CDHA a modifié les privilèges de la Dre Horne en vertu d’un article du règlement disciplinaire ayant pour objet de protéger les patients contre les pratiques dangereuses d’un médecin.
À la fin de 2005, l’association du personnel médical du district de l’hôpital, poussée à bout par des années de tergiversation de la part de la CDHA, a désigné un groupe de quatre experts chargé d’examiner les allégations portées contre la professeure Horne. Le groupe a conclu que les accusations n’étaient étayées d’aucun élément de preuve. La CDHA n’a pas tenu compte du rapport parce qu’une entente de règlement négociée plus tôt sous l’autorité de l’éminent médiateur Martin Teplitsky avait été conclue entre le directeur général de la CDHA, l’Université Dalhousie et la Dre Horne. Le règlement par voie de médiation aurait permis de rétablir les privilèges de la professeure en 2003.
L’ACPPU a certes critiqué la direction de l’Université Dalhousie pour avoir manqué de défendre la Dre Horne face à l’injustice dont elle était victime. Néanmoins, le recteur de l’établissement, Tom Traves, est sorti de son silence au cours de l’année dernière et a assuré que la professeure n’avait fait l’objet d’aucune autre sanction à l’université.
Lors de l’assemblée de novembre du Conseil de l’ACPPU, les délégués ont convenu de mettre fin à l’examen d’une motion de censure contre l’Université Dalhousie.
Selon le directeur général de l’ACPPU, James Turk, c’est l’hôpital d’enseignement affilié à cette université, la Capital District Health Authority, qui a causé les problèmes à la Dre Horne.
Il a fait remarquer que le personnel enseignant clinicien est plus vulnérable que le personnel académique en général du fait qu’il est placé sous la double autorité de l’université et de ses établissements de santé affiliés et que, bien souvent, il ne bénéficie aucunement de la protection d’une convention collective.
« Ce n’est pas le fruit du hasard si la majorité des dossiers en cours touchant à la liberté académique concernent des membres du personnel enseignant clinicien », a noté M. Turk.
L’exposé de la demande de la Dre Horne comporte des allégations qui n’ont pas subi l’épreuve des tribunaux, et les mémoires de défense n’ont pas encore été déposés.