Pour qu’une organisation fonctionne, il faut toutes sortes de personnes possédant toutes sortes
de compétences, et nos associations de personnel académique ne font pas exception à la règle. Cependant, quand vient le temps des hommages (un exercice organisationnel très important), tous n’ont pas droit à la même attention. Par exemple, les comités de négociation travaillent intensément pendant une période relativement courte (j’insiste sur le mot « relativement » puisqu’il arrive que les négociations soient pénibles et qu’elles s’étirent sur de longues périodes). Lorsque leurs tâches sont terminées et qu’une convention collective a été signée, on remercie et félicite leurs membres publiquement, ce qu’ils méritent. Or, il existe un autre groupe de membres qui s’emploie jour après jour, à longueur d’année, à défendre les droits des membres et à s’assurer que les employeurs respectent les conventions collectives négociées. Vous l’au-
rez deviné : je veux parler des agents de griefs, ces héros méconnus de nos associations.
Comme je l’ai mentionné, les agents de griefs ne connaissent pas de répit. Leur fonction ne convient pas à tous : elle exige des qualités particulières. Pour l’exercer, il faut, de toute évidence, un sens aigu de la justice, mais aussi des qualités comme la persévérance et l’audace afin de défendre les plaignants avec passion sans se laisser intimider par les administrateurs ou les avocats représentant les établissements. Bien entendu, il est essentiel de bien connaître le contenu de la convention collective et de savoir écouter avec empathie quand vient le temps de comprendre et de documenter la nature des griefs.
En décembre 2006, l’ACPPU a tenu son atelier annuel à l’intention des agents de griefs principaux. Y ont participé plus de 40 personnes des deux sexes et de différents âges, provenant de diverses régions et d’établissements de taille variable. Les résultats de la deuxième
enquête annuelle de l’ACPPU sur les griefs ont été présentés au cours de l’une des séances inaugurales.
Ils fournissaient une intéressante vue d’ensemble des points de friction entre les membres et les administrations ainsi que des pro-blèmes auxquels font face nos agents de griefs. Les motifs de grief les plus fréquents sont les questions disciplinaires, les différends en matière de rémunération, le renouvellement, la charge de travail, la promotion et la permanence.
Les deux premiers motifs concernent des questions contractuelles fondamentales, communes à de nombreux lieux de travail. Par contre, le renouvellement, la charge de travail, la promotion et la permanence, dossiers plus étroitement liés au milieu académique, exigent de nos agents de griefs des connaissances et des compétences spéciales additionnelles.
Les autres motifs importants sont les droits de la direction, les congés, l’environnement de travail, la liberté académique, la discrimination, la propriété intellectuelle et les dossiers personnels.
L’enquête a également permis de cerner plusieurs nouveaux dossiers. Étant donné l’augmentation du nombre de contractuels syndiqués chez le personnel académique, le nombre de griefs touchant les renouvellements de contrat est monté en flèche. L’importance croissante de la législation en matière de droits de la personne, en particulier du devoir d’accommodement, a entraîné une augmentation du nombre de griefs portant sur les droits des collègues ayant une incapacité mentale ou physique. Pendant la discussion qui a eu lieu dans le cadre de la séance, plusieurs participants à l’atelier ont fait observer que le nombre de cas opposant deux membres est en hausse, ce qui pose des défis très différents de ceux qui sont liés aux cas habituels, opposant un membre et l’employeur.
Enfin, l’enquête traitait du nombre de griefs et du pourcentage de ceux-ci qui sont soumis à l’arbitrage. Le nombre de griefs déposés varie énormément selon les associations, allant de zéro dans l’une d’elles à un maximum annuel de 21 dans une autre. Le pourcentage de griefs soumis à l’arbitrage, qui est très faible, est plus uniforme, ce qui indique qu’un traitement offensif et efficace des griefs (c’est-à-dire le dépôt d’un nombre aussi grand de griefs que nécessaire) peut donner d’heureux résultats pour les membres sans entraîner le processus long et coûteux que constitue l’arbitrage.
Quelles autres conclusions pouvons-nous tirer de cette modeste enquête? D’une part, les agents de griefs doivent participer dans une large mesure à la planification des négociations : ils sont souvent les mieux placés pour déterminer certaines des clauses les plus problématiques de la convention en vigueur, les comportements inappropriés de l’employeur qui doivent être contrés au moyen de nouvelles dispositions dans la convention collective, ainsi que les tendances nouvelles ou imprévues en milieu de travail. Comme les a décrits Paul Jones, organisateur de l’atelier et agent de la formation de l’ACPPU, les agents de griefs sont comme les « canaris dans les mines de charbon », ils sont souvent les premiers à reconnaître les nouveaux dangers au travail.
Il nous reste encore beaucoup à apprendre. Pour cette raison, l’ACPPU compte mener une enquête plus approfondie sur le sujet. Ceci nécessitera que l’on demande aux associations de consacrer une partie de leur précieux temps à remplir un questionnaire, mais cela devrait nous permettre d’obtenir des données très utiles sur les tendances actuelles et nouvelles au pays. Le taux de participation élevé à l’enquête actuelle montre que nos membres sont disposés à participer à de telles opérations de collecte de données lorsqu’ils estiment que les renseignements recueillis en valent la peine.
Pour continuer l’excellent travail réalisé au chapitre du règlement des griefs par les associations à la grandeur du pays, il nous faudra relever un autre défi. Étant donné que la cohorte de personnel académique d’expérience qui s’est occupée des griefs va partir à la retraite, il faudra se pencher sur la question du renouvellement. Il sera absolument essentiel de trouver et de former de nouveaux membres pour jouer ce rôle. Peut-être aurons-nous bientôt la relève nécessaire : au dernier atelier, il était réconfortant de constater la présence de nouvelles recrues souhaitant apprendre les trucs du métier et d’agents de griefs chevronnés prêts à faire part de leur expérience et de leurs connaissances.
Pour terminer, j’aimerais rappeler que l’ACPPU offre sur place à ses associations membres un atelier pratique sur le règlement des griefs. Cet atelier gratuit a été conçu pour aider les nouveaux venus de ce secteur du travail de l’association à traiter les griefs d’une manière productive et efficace. Encore une fois, bravo à ces héros méconnus, nos agents de griefs!