Manifestation des syndicats de la Colombie-Britannique contre la loi sur l'amélioration de la prestation des services sociaux et de santé, au moment de sa promulgation il y a quatre ans. [PHOTO : Hospital Employees Union]
Dans une décision marquante rendue le 8 juin, la Cour suprême du Canada affirme que la négociation collective est protégée par la Charte des droits et libertés. Ce jugement signifie que les gouvernements ne peuvent réduire leurs coûts en révoquant la totalité ou des parties fondamentales des conventions collectives négociées.
Dans son jugement pris à six contre un, la Cour suprême déclare inconstitutionnelles certaines parties de la Health and Social Services Delivery Improvement Act (loi sur l’amélioration de la prestation des services sociaux et de santé) de la Colombie-Britannique, qui privaient les travailleurs et les travailleuses de la santé de cette province de leurs droits prévus dans les conventions collectives et qui ouvraient la voie à des pertes d’emploi massives ainsi qu’à la passation de marchés à des multinationales.
« Le droit de négocier collectivement avec un employeur accroît le degré de dignité, de liberté et d’autonomie des travailleurs en leur permettant d’influer sur l’établissement des règles de travail et, par conséquent, d’exercer un certain contrôle sur un important aspect de leur vie, c’est-à-dire le travail », ont indiqué la juge en chef Beverley McLachlin et le juge Louis LeBel dans leur décision.
Rosemary Morgan, conseillère juridique de l’ACPPU, a déclaré que le jugement de la Cour suprême se démarque considérablement des décisions antérieures. « La Cour suprême déclare maintenant non seulement que le droit de négocier collectivement est un droit fondamental qui existait avant l’adoption de la Charte, mais aussi que la négociation collective renforce les valeurs connexes prévues par la Charte que sont la démocratie, l’égalité et la liberté d’expression », a affirmé Mme Morgan.
Les décisions judiciaires prises antérieurement ne tenaient pas compte des différences entre les organisations, traitant les clubs littéraires et les syndicats de la même manière pour ce qui est de la liberté.
Comme l’indique le jugement, qui a également été signé par les juges Michel Bastarache, Ian Binnie, Morris Fish et Rosalie Abella, « L’effet regrettable (de cette démarche décontextualisée) a été qu’on a négligé l’importance qu’a toujours revêtue la négociation collective pour l’exercice de la liberté d’association en matière de relations de travail. »
« L’histoire révèle que, au Canada, bien avant l’établissement des régimes de travail obligatoires dont nous bénéficions de nos jours, on reconnaissait que la négociation collective constituait un aspect fondamental de la société, à savoir l’activité collective la plus importante pour l’expression de la liberté d’association en milieu de travail. »
James Turk, directeur général de l’ACPPU, a dit avoir bon espoir que, par suite de ce jugement, la Federation of Post-Secondary Educators, qui compte 8 000 membres, obtiendra un résultat semblable pour la contestation aux termes de la Charte d’une loi parallèle de la Colombie-Britannique qui permet aux collèges employeurs de refuser de négocier ou de reconnaître d’importantes conditions de travail en ce qui concerne entre autres l’effectif maxi-
mal des classes, le nombre maximal d’étudiants par chargé de cours, le contrôle des techniques d’enseignement, les heures et les jours de travail, les heures d’activité, les limites quant à l’établissement du calendrier des périodes de perfectionnement professionnel et des vacances, et les restrictions quant à la mesure dans laquelle les tâches liées à l’enseignement peuvent être assignées à des non-enseignants.
« La Public Education Flexibility and Choice Act (loi sur la souplesse et le choix en matière d’enseignement public) porte atteinte à la nature fondamentale du contrat de travail du personnel académique, notamment en compromettant la liberté académique d’une manière manifeste », a ajouté M. Turk.
« Il s’agit d’un argument de poids, maintenant appuyé par une décision, selon lequel le gouvernement n’a pas respecté le droit à la liberté d’association garanti au secteur par la Charte. »
L’ACPPU agit à titre d’intervenant dans cette affaire.