Un important rapport publié le mois dernier par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) recommande que les gouvernements jouent un rôle plus actif dans la « direction » des universités et les collèges tout en augmentant les frais de scolarité.
Ce rapport, rédigé d’après les résultats d’un examen de trois ans des politiques touchant l’enseignement supérieur dans 24 pays industrialisés, indique que les principaux défis auxquels font face les gouvernements et les établissements d’enseignement relèvent des moyens à entreprendre pour assurer une meilleure reddition de comptes, diversifier les sources de financement, promouvoir la qualité et tisser des liens plus solides avec le marché du travail.
Selon les auteurs du rapport, les gouvernements peuvent mieux traiter ces enjeux en élaborant des mécanismes de financement axés sur le rendement, en subventionnant des études axées sur l’éducation offerte par le secteur privé et les établissements à but lucratif et en exigeant des étudiants qu’ils assument une partie des coûts de leur formation.
Mais David Robinson, directeur général associé de l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université (ACPPU), affirme que nombre des recommandations du rapport pourraient avoir de sérieuses conséquences pour le personnel académique.
« Dans l’ensemble, elles visent à assurer un plus grand contrôle du gouvernement sur les universités et les collèges, un enseignement supérieur axé davantage sur la formation professionnelle, ainsi que l’augmentation du parrainage commercial et de la privatisation », explique-t-il.
Bien qu’il accueille favorablement les conclusions du rapport appelant les établissements à se concentrer davantage sur la diffusion des résultats de R-D auprès du public plutôt que sur leur commercialisation, M. Robinson met en garde contre les recommandations portant des modifications à la structure du personnel académique, notamment en ce qui a trait à la précarisation des emplois, car il s’agit de certains des « aspects les plus troublants » du rapport.
Même si le rapport indique qu’il est nécessaire de rendre les carrières dans le secteur universitaire et collégial plus attirantes, M. Robinson affirme que les principales recommandations viennent saper cet objectif. Le rapport reconnaît que la précarisation s’est accrue, mais appelle néanmoins les universités et les collèges à adopter des contrats d’emploi « plus souples ».
Le rapport reconnaît également que les salaires du personnel académique sont trop bas, mais soutient que plutôt que d’accorder une augmentation générale à tous les membres (ce qui serait trop coûteux selon ses conclusions), les établissements d’enseignement devraient jouir d’une grande discrétion en ce qui concerne les hausses de salaire au mérite.
« Si nous avons appris quelque chose à propos de la rémunération au mérite, c’est bien ceci : elle est extrêmement coûteuse à gérer, elle est presque toujours perçue comme arbitraire et elle rend presque tout le monde malheureux », souligne M. Robinson.
Le rapport appelle également au dégroupement des emplois dans le secteur universitaire et collégial afin de séparer les postes d’enseignement des postes de recherche et prétend que le système de titularisation n’est en fait peut-être pas nécessaire pour garantir la liberté académique. Le rapport conclut que les établissements doivent trouver des façons de « faire concorder la liberté académique avec leurs propres objectifs ».
« Il démontre en fait une compréhension limitée et très insuffisante de la liberté académique », indique M. Robinson. « La liberté d’expression fait également une place au droit du personnel académique d’exprimer son opinion sur l’établissement ou le système dans lequel il travaille, sans être exposé à la censure. Le rapport de l’OCDE suggère que la liberté prend fin lorsqu’il y a conflit entre les priorités du personnel et celles de l’établissement. Et un tel point de vue limite sérieusement la liberté académique. »