Pour ma toute première rubrique dans le Bulletin, j’aimerais me présenter et puis esquisser brièvement certains des défis qui se posent à nous. J’ai été élue vice-présidente de l’ACPPU en 2007, après de nombreuses années de militantisme au sein de l’association du personnel académique de l’Université York, où j’ai exercé diverses fonctions, dont celles de présidente pendant trois ans et de co-déléguée syndicale en chef jusqu’à tout récemment. Mes activités de recherche sont orientées vers l’étude des questions d’équité dans les établissements universitaires.
L’an dernier, au cours de mon mandat de vice-présidente, j’ai été frappée par l’ampleur et la profondeur du travail de sensibilisation et de syndicalisation de l’ACPPU ainsi que des activités de service qu’elle mène auprès de ses associations membres. J’ai participé à divers ateliers et conférences qui ont remporté un vif succès, et j’ai pu me faire une meilleure idée du rôle de chef de file que l’ACPPU joue dans la défense des valeurs cardinales de la liberté académique et dans la lutte pour que le personnel académique assure le contrôle des décisions relatives aux programmes d’enseignement dans nos établissements. C’est avec un très grand enthousiasme que j’amorce ma première année à la présidence de l’ACPPU.
Il arrive souvent que des questions semblant relever de considérations purement locales et auxquelles doivent faire face nos associations membres soient symptomatiques de tendances nationales, voire internationales. L’un des rôles importants de l’ACPPU est de suivre de près l’évolution des conjonctures politique et organisationnelle qui touchent le secteur de l’enseignement postsecondaire, et de fournir des conseils à ses membres. À l’heure actuelle, par exemple, les employeurs de partout au Canada entament les négociations en cherchant à bureaucratiser et à élargir davantage le cadre d’évaluation du rendement. Confrontée au problème immédiat, une association locale pourrait ne pas reconnaître que ces exigences s’inscrivent dans le sens de la tendance générale et qu’elles constituent en fait un pas de plus vers la corporatisation et la perte de la gouvernance collégiale.
L’ACPPU surveille activement l’application des divers accords de « libre-échange », dont le nouvel Accord général sur le commerce des services, et réagit en conséquence. Dans le numéro du Bulletin du mois dernier, nous avons rendu compte d’une nouvelle étude de l’OCDE sur le secteur de l’éducation postsecondaire, qui est assortie de recommandations fort inquiétantes sur la procédure d’évaluation du rendement, le financement de la recherche orientée et l’atténuation de l’autonomie institutionnelle et professionnelle. Il s’agit là d’un parfait exemple d’un phénomène international qui aura de sérieuses répercussions à l’échelle locale.
Contrairement aux rumeurs évoquant une époque dorée, la vie n’a jamais été facile ni simple dans le secteur postsecondaire, et rien ne laisse croire que cette réalité changera. Le sous-financement chronique de l’éducation supérieure ne cesse de s’aggraver à cause des mécanismes provinciaux de répartition des fonds qui canalisent ceux-ci vers les priorités établies par les gouvernements sans tenir compte du financement de base. Par ailleurs, les programmes de financement fédéraux sont conçus de façon à générer un maximum de capital politique tout en contribuant le moins possible au coût de base de nos établissements.
Les moyens de financement sont de plus en plus axés sur le rendement et soumis à la concurrence. Et l’appel justifié du public à une meilleure reddition de comptes sert à légitimer la centralisation accrue du contrôle de gestion.
La dépendance croissante à l’égard des fonds de recherche parrainée par l’industrie et des fonds institutionnels oblige les établissements à se mesurer avec les autres, minant ainsi les liens étroits entre collègues universitaires tant à l’échelle nationale qu’internationale. Les universités ne cessent de réviser leur structure d’autorité. Les sénats sont de plus en plus dominés par des administrateurs, et leurs pouvoirs diminuent à l’avantage des gestionnaires supérieurs.
L’affaiblissement de la gouvernance collégiale devient à la fois un défi et une occasion d’agir pour nos associations membres. Ces dernières deviennent les seules voix autonomes et collectives pour le personnel académique sur nos campus. Il est essentiel pour nos associations que la défense de la gouvernance collégiale soit intégrée au rang de nos préoccupations constantes pour les questions économiques et de la lutte pour la préservation de notre autonomie en enseignement et en recherche. L’ACPPU doit continuer à agir en amont et à jouer un rôle de premier plan sur tous ces fronts.
Partout au pays, l’interdépendance grandissante des secteurs des collèges et des universités donne souvent naissance à de nouveaux établissements hybrides et ouvre la porte à la création de partenariats divers et innovateurs. Le danger, toutefois, est que les gouvernements y voient un moyen de définir l’éducation uniquement en termes de compétences étroites plutôt qu’un moyen donnant droit à des compétences générales, à des connaissances spécialisées, à une vie intellectuelle et à la citoyenneté.
Pour sa part, l’ACPPU a pour défi de veiller à la syndicalisation de facto des membres du personnel académique de l’ensemble du secteur de l’enseignement postsecondaire. À cette fin, les délégués à l’assemblée du Conseil de l’ACPPU tenue le mois dernier ont appuyé massivement les demandes d’adhésion du SCFP 3902 (unité 3), qui représente 850 employés contractuels à temps partiel à l’Université de Toronto, et de l’Alberta Colleges and Institutes Faculties Association (ACIFA). Avec plus de 6 000 membres, l’ACIFA est représentative de la nouvelle image de l’éducation postsecondaire. L’ACPPU doit être en première ligne pour former des coalitions dans tout le secteur postsecondaire, de sorte que les employeurs et les gouvernements ne puissent pas exploiter les rivalités entre nous et diminuer la qualité et les droits du personnel académique dans les universités comme dans les collèges.