Ressortissants étrangers interdits de séjour – Le député britannique George Galloway s’est vu refuser l’accès au Canada. Tariq Ramadan, professeur à l’Université d’Oxford (médaillon du haut) et Adam Habib, analyste politique à l’Université de Johannesbourg (médaillon du bas) sont tous deux interdits de séjour aux États-Unis. [Photos : David Hunt/Jan van der Ploeg]
Le mois dernier, l’ACPPU s’est jointe à des groupes de défense des libertés civiles de tout le Canada pour protester contre la décision du gouvernement Harper d’interdire l’accès au pays au député britannique George Galloway.
Dans une
lettre qu’ils ont envoyée au premier ministre, Penni Stewart et James Turk, respectivement présidente et directeur général de l’ACPPU, indiquent que refuser l’entrée au Canada à M. Galloway constitue de la part de son gouvernement un acte de censure pure et simple envers ses critiques, une tactique qu’il a pourtant lui-même dénoncée au sein de régimes dictatoriaux, notamment celui de l’Iran.
Ils rappellent par ailleurs à Stephen Harper que les États-Unis ont admis M. Galloway, et affirment avoir honte que le gouvernement du Canada adopte envers les critiques venant de l’étranger une attitude caractéristique de la présidence de George W. Bush que le peuple américain a rejetée avec fracas.
Aux États-Unis, parmi des dizaines d’organismes d’universitaires et de défense de la liberté d’expression et des droits civils, la National Education Association, l’American Federation of Teachers et l’American Association of University Professors ont exhorté l’administration Obama à mettre fin à la pratique du gouvernement précédent, qui refusait de délivrer un visa de séjour aux universitaires, aux auteurs, aux artistes et aux militants en raison de leurs affiliations et de leurs opinions politiques.
Dans une
lettre adressée au procureur général Eric Holder, à la secrétaire d’État Hillary Rodham Clinton et à la secrétaire à la Sécurité intérieure Janet Napolitano, ces groupes soulignent que l’exclusion idéologique compromet le dynamisme du débat universitaire et politique.
Jameel Jaffer, directeur du projet de la sécurité intérieure de l’American Civil Liberties Union, estime que même si son gouvernement a un intérêt manifeste à exclure les ressortissants étrangers représentant une menace à la sécurité du pays, aucun intérêt légitime n’est servi par l’exclusion de ces personnes selon des critères idéologiques. Il s’agit d’une pratique mesquine et erronée que l’administration Obama aurait intérêt à abolir sur-le-champ.
L’administration Bush a empêché des dizaines d’intellectuels éminents d’obtenir des postes en enseignement dans des universités américaines, de donner des conférences publiques aux États-Unis et d’assister à des congrès de recherche dans ce pays.
La lettre appelle le gouvernement à revoir plusieurs cas vécus à l’ère Bush, notamment celui d’Adam Habib, commentateur politique sud-africain, éminent défenseur des droits de la personne, intellectuel remarquable et titulaire d’un doctorat obtenu aux États-Unis, qui s’est vu refuser l’accès à ce pays pour assister à des réunions professionnelles sous le prétexte qu’il fallait protéger le pays contre le terrorisme. Pourtant, les autorités américaines n’ont toujours pas exposé les fondements juridiques ou factuels de cette décision. Il semblerait plutôt que le militantisme politique de M. Habib, et non un lien quelconque avec le terrorisme, soit au coeur de cette décision.
Le cas du Suisse Tariq Ramadan, professeur à l’Université d’Oxford, est également évoqué. Décrit par le magazine
Time comme l’un des principaux intellectuels islamiques issus des deuxième et troisième générations d’immigrants musulmans d’Europe, M. Ramadan a été accusé d’avoir appuyé le terrorisme lorsque son visa a été révoqué quelques jours à peine avant son entrée en fonction à l’Université Notre Dame. Après que des groupes américains eurent déposé une poursuite, le gouvernement a retiré ses accusations sans pourtant donner accès à son territoire à M. Ramadan. Une fois de plus, il semble clair que ses critiques acerbes à l’encontre de la politique étrangère des États-Unis expliquent la situation.