L'Association du personnel académique de l’Université Carleton presse l’administration de l’université de mettre un frein à sa pratique néfaste de négociations à huis clos avec des donateurs privés.
Dans une lettre adressée au conseil des gouverneurs de l’université le 20 août, l’Association ne ménage pas ses mots pour dénoncer le manque de transparence et le mépris pour la liberté académique de nouveau en jeu dans la conclusion récente d’un contrat avec CultureWorks, une entreprise privée du secteur de l’éducation.
Le président de l’Association, Jason Etele, a expliqué que les modalités de l’entente entre l’Université Carleton et CultureWorks n’ont pas été divulguées, de sorte que les professeurs et les étudiants en ignorent totalement les implications.
Le secret qui entoure la conclusion de l’entente a fait bondir de nombreux professeurs, qui se disent préoccupés quant à la surveillance de la qualité des programmes.
« Quand l’éducation et la formation sont liées aux perspectives de profits d’une entreprise, le risque d’atteinte à l’intégrité académique est grand », conclut la lettre.
Selon le site Web de l’entreprise, « CultureWorks est une école d’anglais à des fins académiques qui prépare les étudiants internationaux à réussir dans les universités et collèges canadiens. Situés sur les campus, nos établissements partenaires offrent une admission conditionnelle aux étudiants de CultureWorks. »
« Cette (admission conditionnelle) pourrait vraisemblablement entraîner des changements dans
la procédure d’admission à Carleton », signale M. Etele. « L’université a accepté cela sans en parler à personne. »
Le contrat conclu avec CultureWorks s’insère dans la foulée d’une autre entente controversée conclue en 2010 et assortie d’un don de 15 millions de dollars à l’université de la part du magnat du pétrole Clayton Riddell dans le but de créer un nouveau programme de gestion politique.
L’Université Carleton s’est opposée à la divulgation de cette entente pendant un an, et en a finalement rendu publique une version non censurée en juin. Selon l’article 14 de l’entente, un comité de direction composé de cinq membres, qui dispose d’un droit de regard étendu sur le programme, le budget et l’embauche du personnel académique, comptait une majorité de représentants du donateur.
L’établissement a finalement convenu que l’entente « ne reflétait pas pleinement les politiques et les procédures de Carleton » en ce qui a trait à la gestion du budget et à la sélection du personnel, mais seulement après que les modalités de l’entente menaçant la liberté académique aient fait l’objet de critiques publiques acerbes.
Les dispositions de l’entente ont depuis été revues pour « clarifier » le rôle du comité de direction, qui n’a désormais plus le pouvoir d’approuver les décisions relatives à l’embauche ou au programme, mais est appelé à fournir « des conseils stratégiques et opportuns ».
L’Université Carleton n’est pas le seul établissement à soulever la controverse au sujet des paramètres du financement privé.
L’ACPPU avait convenu de frapper d’une sanction de blâme l’Université Wilfrid Laurier et l’Université de Waterloo en novembre, si celles-ci ne modifiaient pas la structure de gouvernance de la Balsillie School of International Affairs de manière à préserver l’intégrité académique des universités.
Le Conseil de l’ACPPU a adopté la motion convenant d’une sanction lors de son assemblée générale il y a quelques mois après avoir longuement étudié l’accord de partenariat que les deux universités ont conclu avec le groupe de réflexion privé Jim Balsillie, le Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale.