Buenos Aires, le 27 septembre. Le président de l'ACPPU Wayne Peters (gauche) aux côtés du professeur colombien Miguel Angel Beltrán. Celui-ci a remercié l'ACPPU pour l'avoir soutenu pendant qu'il a été emprisonné à tort et persécuté par les autorités colombiennes.
Des dirigeants de syndicats et d’associations professionnelles participant à une réunion de haut niveau ont préconisé le resserrement des liens de collaboration entre tous les intervenants du monde entier dans le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche. Une condition essentielle, ont-ils conclu, pour que ce secteur puisse relever avec succès les défis sans précédent auxquels il fait face aujourd’hui.
Plus de 120 délégués ont assisté le mois dernier à la 8e édition de la Conférence internationale sur l’enseignement supérieur et la recherche organisée par l’Internationale de l’Éducation — la fédération syndicale mondiale qui représente plus de 30 millions d’enseignants et d’employés de l’éducation — et présidée conjointement par l’IE et son affiliée en Argentine, la Confederación Nacional de Docentes Universitarios.
« Confrontés à des compressions draconiennes dans le financement public des établissements d’enseignement et dans la rémunération globale du personnel académique, à la hausse des droits de scolarité et aux attaques portées, pour des motifs idéologiques, aux droits à la syndicalisation et à la négociation collective, les syndicats de l’enseignement supérieur et de la recherche luttent partout dans le monde pour leur survie », a déclaré le Secrétaire général de l’IE, Fred van Leeuwen, dans son allocution d’ouverture. « En réalité, la plupart de ces problèmes représentent des défis mondiaux auxquels il faut apporter des solutions mondiales. »
Le Secrétaire général a ajouté que, pour que l’éducation supérieure s’acquitte pleinement de sa mission de service public, il est déterminant de défendre et de promouvoir les droits du personnel académique et général.
« Aucun établissement d’enseignement ne peut faire l’économie d’un corps professoral compétent et engagé s’il espère prospérer, et cela est particulièrement vrai aujourd’hui, alors que les professeurs sont plus mobiles et que les établissements rivalisent d’adresse pour attirer et retenir les plus talentueux », a-t-il déclaré. « Cependant, les universitaires exercent maintenant leur profession dans un climat de tensions grandissantes, victimes de mesures d’austérité qui frappent leur rémunération et leurs conditions de travail, minent leurs droits à la syndicalisation et les poussent de plus en plus vers des emplois à durée déterminée et précaires. Lors de nos interventions auprès de l’UNESCO, de l’OCDE, de la Banque mondiale, du G-20 et du FMI, nous avons systématiquement insisté sur le fait que l’investissement dans l’éducation publique est un facteur indispensable pour répondre à la crise actuelle. »
Le président de l’ACPPU, Wayne Peters, a pris part à une discussion de groupe sur le thème de la recherche et de l’intégrité académique. Il a alors exposé les récents cas très controversés de plusieurs universités canadiennes ayant malencontreusement accordé l’autorité sur les programmes d’études à des donateurs externes.
« Chaque fois, nous avons véhiculé un message simple, mais percutant : les universités doivent être au service de l’intérêt public, et non pas d’intérêts privés », a affirmé M. Peters. « Nous avons malheureusement constaté que les administrateurs de certaines universités n’hésitent pas une seconde à sacrifier l’intégrité académique sur l’autel de l’argent, à permettre à des intérêts externes de dicter leur loi en ce qui a trait à l’enseignement dispensé et aux professeurs recrutés, en échange du financement tant convoité. Par expérience, l’ACPPU sait qu’en fin de compte, seuls les organisations et les syndicats comme ceux qui sont représentés dans cette salle aujourd’hui peuvent se porter à la défense de l’intégrité de l’éducation supérieure, et joignent le geste à la parole. »
Par ailleurs, après discussion, les participants à la Conférence ont entériné la Déclaration politique sur les droits d’inscription, présentée par l’IE. Cette déclaration prône la suppression des droits de scolarité existants.
« Je ne crois pas un seul instant en la pérennité d’un système d’enseignement supérieur financé par le privé qui entraîne les étudiants et leurs familles toujours plus loin dans la voie de l’endettement », a déclaré le Secrétaire général de l’IE. « N’oublions pas que c’est un modèle basé sur le risque et assis sur le même château de cartes — des cartes de crédit, s’entend — qui est à l’origine de la crise financière internationale. »
Reconnaissant que les mêmes menaces pèsent sur tous les milieux académiques où qu’ils soient dans le monde, les dirigeants ont convenu de renforcer la coopération et d’accentuer l’échange d’informations et de pratiques exemplaires dans le cadre des campagnes, de la syndicalisation et de la négociation collective, ainsi que de la promotion de l’équité au sein du secteur.
L’accent a été mis en particulier sur la nécessité de renforcer la solidarité internationale et les initiatives en matière de coopération au développement. Afin de faire un premier pas en ce sens, les participants ont signé une lettre de solidarité avec le professeur colombien Miguel Angel Beltrán.
Présent à la Conférence, le professeur Beltrán a expliqué qu’il avait été faussement accusé par les autorités colombiennes de soutenir le terrorisme parce qu’il avait critiqué le gouvernement dans son travail académique. Sans avoir subi de procès, il a été emprisonné pendant deux ans, période au cours de laquelle il a été torturé. Il a enfin été libéré en 2011, blanchi de toute accusation, sous la pression de la communauté internationale.
Après sa libération, il a reçu des menaces de mort; craignant pour sa vie, il a décidé de fuir son pays. Les signataires de la lettre de solidarité de l’IE demandent à l’administration de l’Université autonome de Colombie de prolonger le congé sabbatique du professeur Beltrán en attendant que les autorités colombiennes prennent des mesures pour garantir sa sécurité. Au terme de la conférence, Combertty Rodríguez García, coordonnateur principal de l’IE pour l’Amérique latine, a souligné l’importance majeure du forum mondial.
« Cette conférence est la preuve qu’ensemble, nous sommes plus forts et que nous pouvons relever avec succès les nombreux défis auxquels sont confrontés les institutions, les syndicats, le personnel et les étudiants de l’enseignement supérieur et de la recherche », a-t-il observé.
La prochaine Conférence internationale sur l’enseignement supérieur et la recherche aura lieu en 2014.