L'ACPPU est reconnue comme le porte-parole national du personnel académique canadien et a pour mission de faire valoir et de défendre les droits ainsi que les intérêts de ses membres au sein du milieu académique. Cette description de notre association est juste, mais un peu courte. La contribution de l’ACPPU au secteur de l’enseignement postsecondaire est beaucoup plus vaste et touche à bien d’autres aspects que les simples conditions qui régissent le milieu de travail.
Dans cette perspective, l’ACPPU apparaît davantage comme une association qui défend les intérêts de l’enseignement postsecondaire en tant que bien public, lui offre son soutien et en assure la promotion. Elle a pour objectif de faire progresser les normes de la profession académique et d’améliorer la qualité ainsi que l’accessibilité de l’éducation postsecondaire. L’ACPPU croit que le premier rôle de nos universités et collèges est de contribuer à l’essor social, culturel, politique et économique de la collectivité par la création et la diffusion du savoir et par l’épanouissement d’une population instruite, capable de penser par elle-même. Toutes ses actions sont guidées par cette croyance.
Toutefois, les idéologies et les politiques économiques de gouvernements néolibéraux sont en train de transformer l’enseignement postsecondaire au Canada, non pas pour le meilleur mais pour le pire, et de miner sa valeur en tant que bien public. Confrontées à l’érosion du financement public et à des pressions pour qu’elles rendent des comptes au marché libre, nos institutions adoptent des pratiques semblables à celles qui ont cours dans les entreprises privées, mais qui sont contraires aux principes sur lesquels s’appuient l’intégrité institutionnelle et la confiance du public, à savoir l’autonomie des établissements, la liberté académique et la direction collégiale. Laissée à elle-même, l’éducation postsecondaire au Canada telle que la conçoit l’ACPPU court à sa perte.
À titre de président de l’ACPPU, je suis extrêmement fier du travail qu’accomplit l’Association pour représenter le personnel académique et suivre l’évolution de l’éducation postsecondaire. Toutefois, je sais très bien que nous avons encore beaucoup de pain sur la planche pour relever les défis de l’heure. L’ACPPU doit être l’instigatrice d’un mouvement visant à défendre de façon encore plus énergique notre vision élargie du rôle des universités et des collèges. À cette fin, elle doit tirer pleinement profit de la diversité et des talents de ses membres, et faire résonner sa voix à l’échelle locale, provinciale et nationale.
Et pourtant, il faudra aller encore plus loin. Au Canada, l’enseignement postsecondaire est, en principe, de la compétence des provinces, mais le fédéral y est également un acteur important. Le véritable défi consiste à exercer une influence politique suffisante pour susciter des changements dans ces deux ordres de gouvernement.
Dans ces conditions, l’ACPPU et ses associations membres doivent tendre à être le fer de lance d’un mouvement social soutenu de larges tranches de la population pour qui l’intérêt supérieur de l’enseignement postsecondaire doit être servi dans une société digne de ce nom. Elles ont besoin, pour y parvenir, de pouvoir compter sur le grand public, sur des gens qui comprennent la valeur qu’apporte à la société un système d’enseignement postsecondaire accessible et financé par l’État, des gens qui sont disposés à ce que l’enseignement postsecondaire prime d’autres domaines de la politique publique. Heureusement, un rayon d’espoir se profile à l’horizon.
L’ACPPU commande régulièrement des sondages d’opinion publique sur l’enseignement postsecondaire. De fois en fois, les sondages montrent que la majorité des Canadiens sont favorables à une hausse du financement de ce secteur, même au prix d’un relèvement des impôts, et que la plupart s’inquiètent des répercussions négatives du manque de financement sur la qualité de l’enseignement. Une étude menée par la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants aboutit à des conclusions semblables. À l’évidence, le public est au rendez-vous et l’ampleur du soutien manifesté garantirait le succès de campagnes de défense de l’enseignement postsecondaire.
Pour maximiser leur force collective, l’ACPPU et ses associations membres doivent d’abord se pencher sur leur structure et leurs méthodes de travail. Ce n’est un secret pour personne qu’un groupe tire sa force de ses membres. L’engagement des membres, leur sentiment d’appartenance à l’association et leur désir de réaliser des objectifs précis sont tous des facteurs primordiaux de la réussite de chaque association. Il en va de même pour l’ACPPU.
L’efficacité de nos activités dépend de notre capacité à amener les membres à s’investir dans le travail collectif à l’association, et à faire naître chez eux un sentiment d’attachement. La véritable force passe par la mobilisation des membres. La réussite tient à la mise en place d’une organisation collective de membres et non pour les membres.
Dans ce contexte, l’ACPPU doit prioritairement devenir un rassembleur, un agent de mobilisation des membres. Il n’est plus temps de se demander si le moment est bien choisi pour s’associer. Nous devons plutôt nous interroger sur la forme de notre association et déterminer le plan de lancement d’un mouvement efficace.
Quelles nouvelles tactiques et stratégies n’ont jamais été appliquées? Comment mobiliser nos membres de manière à leur donner l’impression qu’ils participent à un grand mouvement? Comment les sensibiliser au fait qu’en faisant cause commune, on peut améliorer l’avenir de l’enseignement postsecondaire et la vie de tous ceux qui y oeuvrent, et contribuer au mieux-être de la société canadienne dans son ensemble? Comment insuffler le désir de viser plus haut parce que la vision qui nous anime en vaut la peine? Et comment, dans tous ces élans, communiquer le sentiment qu’une victoire est vraiment possible?
Pour inscrire cette réflexion dans la réalité, l’ACPPU doit s’engager à promouvoir et à mettre en place un modèle de mobilisation de ses membres. Revenir à la base, inspirer les membres dans leur militantisme et en récolter les fruits. Nous devons donner à nos membres les moyens d’instaurer une culture du militantisme académique qui s’intéresse à un large éventail d’enjeux politiques, sociaux et économiques en lien avec l’enseignement postsecondaire et le devoir des membres de participer, en tant qu’intellectuels publics, à l’orientation des politiques gouvernementales.
Comme toujours, l’ACPPU doit appuyer ses efforts de mobilisation sur des collaborations avec ses partenaires actuels et ses congénères qui partagent ses vues progressistes sur l’enseignement postsecondaire et une société civile démocratique. La solidarité des divers groupes syndicaux du grand secteur public est également un facteur déterminant dans la réussite des campagnes de promotion de la justice sociale ou du bien public.
En définitive, cependant, l’ACPPU devrait toujours être évaluée selon les améliorations qu’elle apporte à la vie au travail de chaque membre du personnel académique, la qualité et l’accessibilité de l’enseignement postsecondaire et la capacité des associations locales de faire valoir leurs objectifs et ceux de l’ACPPU. Si nous marquons des points dans ces domaines, nous aurons bien fait notre travail.