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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

janvier 2014

Les syndicats de l’Alberta s’opposent à deux projets de loi controversés

Wayne Peters, président de l'ACPPU (à gauche), et Erin Patterson, présidente du Comité des bibliothécaires et des archivistes de l'ACPPU (à droite), ont remis à Linda Winkler le Prix des bibliothécaires pour services émérites de l'ACPPU. [Alberta Union of Provincial Employees]
Wayne Peters, président de l'ACPPU (à gauche), et Erin Patterson, présidente du Comité des bibliothécaires et des archivistes de l'ACPPU (à droite), ont remis à Linda Winkler le Prix des bibliothécaires pour services émérites de l'ACPPU. [Alberta Union of Provincial Employees]
L’adoption expéditive en décembre des projets de loi 45 et 46 du gouvernement albertain — portant atteinte à la liberté d’expression et dépouillant les employés du sec­teur public de leur droit bien établi à un processus d’arbitrage exécutoire — a provoqué de farouches protestations devant l’Assemblée légis­lative, des contestations judiciaires et le dépôt d’une plainte pour négociation de mauvaise foi auprès de l’Alberta Labour Relations Board.

Le projet de loi 45, Public Sector Services Continuation Act, qui n’est pas encore en vigueur, impose des sanctions plus sévères aux syndicats qui optent pour la grève illégale ou pour « tout acte qui peut être raisonnablement considéré comme une préparation à la grève ». Parmi les sanctions, on compte la suspension des cotisations syndicales, des amendes quotidiennes passant de 1 000 $ à 250 000 $ et de nouvelles charges quotidiennes de 1 million de dollars au nom de la responsa­bilité syndicale pour récupération des sommes perdues par l’employeur.

En outre, le projet de loi permet au gouvernement d’imposer une amende aux membres du public qui expriment leur soutien à la grève illégale ou à des « menaces de grève ».

Le projet de loi 46, Public Service Salary Restraint Act, qui est entré en vigueur le 11 décembre, impose un règlement salarial aux 22 000 employés provinciaux membres de l’Alberta Union of Provincial Employees (AUPE), si le syndicat et la province ne parviennent pas à une entente d’ici le 31 janvier 2014. Cette loi élimine aussi le droit de recourir à l’arbitrage de différends en cas d’impasse des négociations. L’AUPE et le Public Service Commissioner négocient depuis mars 2013 en vue d’une nouvelle convention collective.

Le gouvernement propose un gel des salaires de deux ans, un montant forfaitaire de 875 $ la deuxième année, et une augmentation de 1 % les troisième et quatrième années de l’entente. De plus, il exige le renouvellement automatique de toutes les conditions d’emploi énoncées dans la précédente convention, sans aucun changement, pour les quatre années de la nouvelle entente.

Le président de l’AUPE, Guy Smith, souligne que les employés provinciaux sont privés du droit de grève depuis 1977, mais qu’ils avaient, jusqu’en décembre dernier, le droit de recourir à l’arbitrage exécutoire en cas de profonds différends. Dans le projet de loi 46, la province ne redonne pas le droit de grève à ses employés.

« C’est comme si le gouvernement déposait un bâton de baseball sur la table de négociation, sachant qu’en fin de compte, il pourra tout simplement imposer le contrat de travail qu’il veut », a déclaré M. Smith.

L’AUPE conteste le projet de loi devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta, pour le motif que ses dispositions violent la liberté d’expression et la liberté d’association garanties par les articles 2 et 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, et en exige l’invalidation.

La province a déposé un mémoire en défense au début de janvier, invoquant que le syndicat n’a pas la qualité pour se placer sous la protection de la Charte, et n’a pas non plus le droit d’intenter une action en justice en vertu de la Charte et au nom des particuliers membres de l’AUPE.

La province soutient également que la loi « ne prive pas les parti­culiers membres de l’AUPE de la liberté d’association » ni n’enfreint la Charte, et demande le rejet de la requête.

Par ailleurs, l’AUPE a déposé au­près de l’Alberta Labour Relations Board une plainte pour négociation de mauvaise foi, alléguant que le gouvernement, dans le projet de loi 46, à la fois viole les libertés fondamentales garanties par la Charte et « fait fi » des principes fondamentaux qui sous-tendent la Public Service Employee Relations Act, loi ré­gissant les relations du travail dans la fonction publique provinciale. Les audiences de la commission doivent avoir lieu en janvier.

L’Alberta Federation of Labour (AFL) a lancé, au nom de quelque 145 000 syndiquées et syndiqués provin­ciaux, une campagne de pu-blicité télévisée dénonçant les tactiques du gouvernement conservateur et qualifiant la première mi-nistre Alison Redford de despote après que « les conservateurs albertains ont usé de leur majorité pour faire adopter à toute vapeur les projets de loi 45 et 46 ».

« Si elle pense que les menaces, le despotisme et l’intimidation dissuaderont les employés de revendiquer leurs droits et de s’opposer à son programme insensé de coupes et de recul en pleine période de prospérité, elle se trompe royalement », a affirmé le président de l’AFL, Gil McGowan. Selon lui, les deux projets de loi violent la Charte cana­dienne des droits et libertés et son syndicat se prépare aussi à intenter des poursuites judiciaires.

M. McGowan signale qu’il faudra vraisemblablement plusieurs années avant que la contestation judiciaire fondée sur la Charte ne soit réglée et, dans l’intervalle, il invite les Albertaines et les Albertains de toutes les régions de la province à faire front contre la diminution des droits des travailleuses et des travailleurs.