Le projet de modification de la Loi sur l’Université du Nouveau-Brunswick prévoit une réforme en profondeur qui transformera complètement la plus vieille université de langue anglaise au Canada, tout en dotant le conseil des gouverneurs de pouvoirs inégalés, selon certains observateurs.
La loi, qui constitue l’université et en définit la composition et les pouvoirs, est soumise à l’examen d’un comité créé à cette fin au début de 2013.
Les membres du comité ont travaillé en secret jusqu’à tout récemment. La publication, en septembre, d’un document de 150 pages énonçant les modifications proposées à la loi causait donc la surprise au sein de la communauté universitaire qui se voyait accorder un délai de six semaines pour y répondre.
« C’est assez horrible », a déclaré Miriam Jones, présidente de l’association du personnel académique de l’Université du Nouveau-Brunswick. « Somme toute, c’est une appropriation radicale du pouvoir de la part du conseil. L’université sera soustraite à la surveillance gouvernementale, et ses sénats — l’UNB a deux campus — pourraient être abolis. »
Les deux sénats ont voté massivement pour demander un délai accru afin d’analyser le complexe projet de modification, qui renvoie en outre à de nombreuses pages de règlements, et d’y répondre.
Mme Jones craint que les dispositions de la loi liées à la gouvernance collégiale et à la convention collective ne soient supprimées du corps de la loi où elles sont protégées, et intégrées à la réglementation que le conseil peut modifier de son propre gré.
Ces changements « bafouent totalement les droits du personnel académique et vont à l’encontre d’une pratique bien établie dans les universités canadiennes », selon un message affiché sur le site web de l’association du personnel académique le mois dernier. « Les modifications (…) ont englouti toutes les mesures importantes de reddition publique de comptes. Si elles sont promulguées, l’UNB fonctionnera comme une société privée à but lucratif, plutôt qu’une ressource et un service publics. »
En outre, le projet de modification surgit à un moment où la confiance envers les dirigeants et le conseil est lourdement ébranlée à la suite de la grève et du lockout de janvier — les premiers dans l’histoire de l’université — qui ont mené à des votes de non-confiance envers la direction de l’établissement.
Des représentants du gouvernement provincial ont d’ailleurs rappelé que la modification d’une loi doit faire l’objet non seulement de consultations internes, mais aussi de consultations externes « importantes ».
Seules les modifications adoptées par l’Assemblée législative de la province ont force de loi.
En octobre, Mme Jones a écrit au recteur Eddy Campbell afin de demander plus de temps pour pouvoir consulter l’ensemble de la communauté, mais n’a pas reçu de réponse.
« Nous osons espérer qu’il y aura un véritable processus de consultation et une prise en considération des propositions qui en émaneront », ajoutait-elle dans la lettre.