« Le rapport du comité d’enquête met au jour des problèmes très préoccupants au sein du département de science économique », affirme le directeur général de l’ACPPU, David Robinson.
Une enquête menée au sein du département de science économique de l’Université du Manitoba a révélé de graves violations de la liberté académique et l’existence d’un climat de travail « pernicieux qui perturbe le fonctionnement du département au point où celui-ci est en crise ».
Le Comité de la liberté académique et de la permanence de l’ACPPU a mis sur pied l’an dernier un comité d’enquête à la suite d’allégations selon lesquelles des efforts au sein du département avaient pour effet d’éliminer ou de restreindre les approches et les points de vue qui s’écartent du courant de pensée dominant en économie. Or, le département s’était forgé une réputation d’ouverture aux deux courants principaux en économie, orthodoxe et hétérodoxe, tant pour l’embauche des professeurs que pour l’établissement des programmes d’études.
« Un changement d’orientation ou de priorité dans une unité académique n’est pas, en soi, du domaine de la liberté académique », fait observer le comité dans son
rapport (en anglais) rendu public en janvier. « Cependant, nous sommes arrivés à la conclusion que, envisagées collectivement, les décisions et les actions au sein du département ont constitué des violations de la liberté académique en créant un environnement dans lequel les collègues hétérodoxes étaient déconsidérés. »
Le comité a relevé des cas où des professeurs et des étudiants diplômés hétérodoxes avaient été traités avec peu d’égards et où leurs contributions avaient été diminuées, ainsi que des tentatives de réaffecter des cours à des professeurs orthodoxes.
« Des violations de la liberté académique ont effectivement été commises lorsque des membres orthodoxes du département ont eu des comportements discriminatoires à l’endroit de doctorants supervisés par des économistes du courant hétérodoxe », de conclure le comité. « Ces comportements se sont notamment manifestés lors d’évaluations orales, et sous la forme de conseils en matière de domaines d’étude, de décisions de financement, et de mises en garde, en vue de la poursuite d’une carrière, contre le choix de superviseurs du courant hétérodoxe. »
La direction de l’université s’est vite insurgée contre les conclusions de l’enquête, accusant le comité de ne pas avoir entendu tous les membres du département et d’avoir ainsi fait preuve de « parti pris ».
Selon David Robinson, directeur général de l’ACPPU, le comité a offert à toutes les parties de nombreuses possibilités de participer à l’enquête, mais la direction a fortement suggéré aux membres du département de science économique de ne pas le faire.
Lors de la réunion du sénat de l’Université du Manitoba le 4 février, le recteur de l’établissement, David Barnard, a rejeté les conclusions selon lesquelles il y avait eu violation de la liberté académique et prétendu que le comité avait fait un mauvais usage du terme.
« Je l’ai maintes fois répété : à mon avis, la menace la plus importante qui pèse sur la liberté académique au Canada est d’en élargir la définition au point où le concept est si dilué qu’il en perd son sens et toute pertinence », a-t-il affirmé.
Len Findlay, président du Comité de la liberté académique et de la permanence de l’emploi de l’ACPPU, a qualifié la déclaration du recteur au sénat de « très hypocrite ».
« La plus grande menace à la liberté académique au Canada provient des tentatives des hauts dirigeants d’en diminuer la portée et d’en décourager l’exercice », a-t-il signalé. « Cette mise en danger téméraire de la liberté académique découle d’une direction qui préfère une unité académique bien domptée, et non du personnel académique et de ses associations locale et nationale. »
Le rapport recommande la recherche d’un nouveau directeur de département, un examen externe des programmes d’études du premier cycle et des cycles supérieurs, et un engagement à assurer la pérennité de la longue cohabitation des courants orthodoxe et hétérodoxe dans le département.
« L’atmosphère et les relations au sein du département de science économique sont le reflet des divisions et de l’amertume qui persistent », peut-on lire dans le rapport. « La situation actuelle ne peut durer. »
M. Robinson a demandé par écrit à rencontrer M. Barnard afin de discuter des conclusions et des recommandations formulées dans le rapport.
« Le rapport du comité d’enquête met au jour des problèmes très préoccupants au sein du département », a affirmé M. Robinson. « Tout le monde a intérêt à ce que la situation soit rapidement résolue. »
Les membres du comité d’enquête étaient Allan Manson, professeur à la Faculté de droit de l’Université Queen’s; Pamela McCallum, professeure au département d’anglais de l’Université de Calgary; et Larry Haiven, professeur au département de gestion de l’École de gestion Sobey de l’Université Saint Mary’s.