Les postes de professeur à temps plein ne sont déjà pas légion au Canada et voilà maintenant que les Canadiens bardés de compétences font face à un obstacle de plus pour y accéder. Telle est la conséquence d’une entente, conclue en février dernier entre le gouvernement fédéral et les établissements d’enseignement postsecondaire, qui prévoit des exemptions spéciales aux règles d’embauche de travail leurs étrangers temporaires ayant pour effet de faciliter le recrutement international d’universitaires. Les universités et les collèges se prévalent depuis des années du programme des travailleurs étrangers temporaires pour faire venir au Canada des professeurs et des chercheurs à temps plein.
« Le programme a pour objet de combler les pénuries temporaires de main-d’oeuvre et non de servir d’outil de recrutement pour des postes permanents », fait valoir le directeur général de l’ACPPU, David Robinson. « En réalité, la candidature d’une multitude d’universitaires canadiens qualifiés qui travaillent sous contrat temporaire et à temps partiel devrait être considérée pour des postes à temps plein. »
Depuis que le gouvernement fédéral a resserré les règles du programme des travailleurs étrangers temporaires en juin 2014, les établissements d’enseignement postsecondaire désireux de pourvoir des postes à haut salaire ont l’obligation de présenter un plan de transition au gouvernement. Ce plan doit indiquer les mesures que l’établissement s’engage à prendre pour que des citoyens canadiens puissent occuper des postes détenus par des travailleurs étrangers temporaires.
La nouvelle entente dispense les établissements postsecondaires de cette obligation. Les universités et les collèges s’autoréglementeront plutôt en rendant des comptes à leur organisation nationale, l’Association des universités et des collèges du Canada (AUCC).
Le recrutement à l’étranger peut être un moyen de pourvoir certains postes spécialisés en cas de pénurie de candidats canadiens qualifiés, de dire M. Robinson, mais les universités devraient, comme tous les autres employeurs, « démontrer au gouvernement le bien-fondé de leurs demandes ».
En 2011, année du dernier recensement, le Canada comptait 5 961 diplômés de programmes de doctorat canadiens. Cette même année, 2 034 professeurs à temps plein étaient nommés dans l’ensemble du Canada.
Selon M. Robinson, les exemptions sont injustifiées. « Il n’y a tout simplement aucune preuve d’une pénurie généralisée de professeurs au Canada », soutient-il. « Il semble que les universités veuillent jouer avec les règles aux dépens de Canadiens qualifiés. »
Le directeur général de l’ACPPU avance que la véritable motivation des universités est peut-être de mieux se positionner dans le classement mondial des établissements, dont un des critères est le nombre d’étudiants et de professeurs étrangers attirés.