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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

septembre 2015

Queen B sous la loupe des étudiants

Cet automne, la professeure Naila Keleta-Mae fouettera l’esprit critique des étudiants de premier cycle de l’Université de Waterloo qui suivront son cours sur la diva de la culture populaire, Beyoncé.

Cette innovation, explique la professeure, est due au fait que Beyoncé, le dernier opus de l’artiste la plus vendue, est une performance qui mérite d’être analysée du point de vue académique.

« Cet album en particulier, depuis la forme de féminisme qui y est revendiquée jusqu’à sa sortie numérique, offre une riche matière à ré­flexion dans le domaine des études de la performance », signale Mme Keleta-Mae, qui enseigne au département d’art dramatique et de communication orale à l’université.

Des cours semblables consacrés à Beyoncé sont déjà dispensés dans d’autres campus, à savoir les universités de Rutgers et de Victoria.

Mais la démarche de Mme Keleta-Mae a fait sourciller quelques intellectuels qui mettent en question sa valeur d’érudition.

Interrogée sur les critiques à son encontre selon lesquelles son cours n’est qu’un artifice qui souffre de légitimité académique, elle explique que les plaintes dont elle a connais­sance proviennent en grande partie de la communauté universitaire elle-même.

« Par contre, j’ai reçu des réactions extraordinairement positives de l’extérieur du milieu universitaire, de personnes très désireuses de poser un regard critique sur leur vie quotidienne », affirme Mme Keleta-Mae.

Les universités, soutient-elle, perpétuent souvent les présup­posés élitistes qui considèrent la culture populaire comme trop primaire pour les têtes pensantes de la tour d’ivoire.

Dès lors, selon elle, se posent les questions de savoir qui détermine ce qui est essentiel et digne d’être étudié dans les universités et comment on en arrive à cette fin.

Pourtant, affirme Mme Keleta-Mae, le thème du cours n’a en fait rien d’extraordinaire.

« En quoi le fait, pour un professeur universitaire d’une faculté des arts, d’étudier une artiste afro-américaine influente à l’échelle internationale est-il menaçant? La véritable question est en fait : pourquoi ne devrait-elle pas être l’objet d’une étude, particulièrement dans le domaine des études de la performance? », insiste-t-elle.

« Beyoncé est une féministe capitaliste qui présente son féminisme dans le contexte du capitalisme consumériste », fait-elle valoir. « Tout au long de ce cours, nous réfléchirons à tous ces aspects, tout en nous appuyant sur l’expérience des universitaires et des féministes spécialistes des études de la performance, au regard de la théorie raciale critique. »

Elle ajoute que les étudiants sont censés acquérir la capacité d’interpréter d’un oeil critique les vidéos et les albums du point de vue de la performance. Et d’appliquer la thé­orie et la méthodologie aux autres façons dont ils perçoivent et comprennent le genre et la performance dans leur quotidien.