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Les Archives du Bulletin de l'ACPPU, 1992-2016

septembre 2016

La candidature incertaine des chercheurs du Royaume-Uni aux subventions de l’UE

Par David Matthews
Brexit
[iStock.com / George Clerk]

TimesHigherEducation.com / 29 juin 2016

Les universitaires du Royaume-Uni pourraient voir leurs chances réduites de bénéficier des subventions de recherche europé­ennes à la suite du vote en faveur de la sortie de l’Union européenne la semaine dernière, selon l’ancienne présidente du Conseil européen de la recherche.

Helga Nowotny a fait cette déclaration lorsqu’il est apparu que la victoire du Brexit allait remettre en cause la participation future du Royaume-Uni aux programmes de recherche de plusieurs milliards d’euros, certains chercheurs européens affirmant qu’ils ne soumettraient plus de candidatures conjointes avec des collègues du Royaume-Uni.

Pour l’instant, les règles restent inchangées, et les univer­si­taires du Royaume-Uni peuvent continuer à poser leur candidature aux subventions du programme européen Horizon 2020 doté de 70 milliards d’euros (102 milliards de dollars).

Mais compte tenu de l’éventuel retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne dans les prochaines années et de l’incertitude entourant les conditions de départ, la professeure Nowotny observe que « compte tenu de la longue procédure qu’impliquent l’évaluation et la négociation des candidatures […], il se peut fort bien que la volonté de continuer à considérer les candidatures des chercheurs du Royaume-Uni aille en s’estompant ».

« Quoi qu’il en soit, le Brexit est mauvais pour la science britannique, pour la science européenne et pour nous tous. Comme c’est le cas dans les sports, lorsqu’un concurrent de haut niveau quitte la partie, le jeu perd inévitablement de son dynamisme. La qualité globale s’en ressentira peut-être, et la concurrence ne présentera pas autant d’attrait », explique-t-elle.

Face à ce climat d’incertitude, certains chercheurs européens n’ont pas tardé à faire savoir qu’ils ne prendraient dé­sormais plus le risque de soumettre une candidature com-mune à une subvention avec des universitaires du Royaume-Uni. Björn Brembs, neurobiologiste à l’Université de Ratisbonne, a déclaré avoir « plusieurs amis et collègues en Grande-Bretagne avec lesquels il ne serait même plus envisageable de présenter une demande de subvention de projet de recherche concertée ».

Pasi Vahimaa, professeur de physique à l’Université de l’Est de la Finlande, a indiqué sur Twitter que « juste au cas où, il pourrait être plus avisé d’exclure dans un proche avenir la participation des chercheurs britanniques au programme Horizon 2020 ».

Cameron Neylon, professeur de communication des résultats de recherche à l’Université Curtin, a confié ne plus savoir s’il allait poser sa candidature à une subvention cet été.

« Au bout du compte, la décision de présenter une propo­sition est une affaire de jugement. Les taux de succès au programme de subventions n’étant pas élevés, il vous faut déterminer si le jeu en vaut la chandelle. Le facteur incertitude pèse particulièrement lourd dans cette appréciation », fait-il observer.

D’aucuns laissent entendre que la participation future du Royaume-Uni aux programmes de recherche européens pourrait dépendre de la question de savoir si une nouvelle entente avec l’Union européenne permettrait la libre circulation des personnes — un enjeu crucial qui, lors de la campagne référendaire, a divisé les politiciens victorieux du Brexit.

Iain Gillespie, pro-vice-recteur (recherche et entreprise) à l’Université de Leicester, y est allé du commentaire suivant : « Évidemment, nous, à Leicester, et bon nombre de nos collègues dans d’autres universités conseillons fortement à nos universitaires de continuer à s’engager dans la recherche en Europe et à soumettre leur candidature à des programmes de subventions européens. C’est le message que nous sommes déterminés à maintenir. »

Et d’ajouter cependant : « Le défi sera d’inciter des chercheurs qui n’ont guère jusqu’ici participé à des projets en Europe à le faire maintenant dans les conditions actuelles d’incertitude. Certes, réussir à mettre la main sur une subvention européenne nécessite un travail énorme qui peut porter ses fruits au final, mais à quoi sert d’investir dans une telle démarche si le résultat est si incertain? »

Un porte-parole du Conseil européen de la recherche a fait savoir que « pour l’instant, rien ne change ».

 « Le droit de l’Union européenne continue à s’appliquer pleinement au Royaume-Uni et dans le Royaume-Uni jusqu’à ce que celui-ci ne soit plus membre de l’Union. Pour ce qui est de l’impact futur sur le financement de la recherche, il est beaucoup trop tôt pour avancer des hypothèses sur la question, poursuit-il. Ce point sera traité en temps voulu, une fois que s’amorceront avec le Royaume-Uni les négociations sur son accord de retrait ainsi que sur l’accord concernant ses relations futures avec l’Union européenne. »