Adela Talbot /
Western News
L’association du personnel académique de Brescia (BFA), que vous présidez, vient de clore avec succès une ronde de négociations collectives. Quel était le mandat des négociateurs?
Nos négociateurs devaient combler l’écart salarial entre le corps professoral de Brescia et ceux de nos pairs à London, le Collège universitaire Huron et le Collège universitaire King’s, ce qu’ils ont réussi à faire. Nous avons signé une entente de quatre ans, au lieu des trois ans habituels. Nous avons consenti à un contrat plus long à condition qu’à son expiration, il n’y ait plus d’écart salarial, ce qui est le cas. Nos efforts portaient particulière-ment sur l’écart salarial pour le niveau d’entrée à titre de professeur adjoint, parce qu’une augmentation à ce niveau se répercute sur tout le reste de l’échelle salariale.
Qu’avez-vous fait pour mobiliser vos membres?
Au cours des cinq dernières années environ, nous avons travaillé fort à déconstruire l’argumentation de l’administration. Cela a été difficile, parce que son argument d’un contexte économique dif-ficile était porteur, et que nos membres avaient adhéré au mantra de l’« austérité ». Nous avons commencé par informer nos membres sur l’état des finances de l’établissement. Année après année, on prévoit un déficit budgétaire, mais il faut analyser les états financiers pour savoir où se trouve l’argent, et démolir la rhétorique de l’austérité. Quand nous avons pu démontrer, faits à l’appui, que les prévisions budgétaires ne reflétaient pas la santé financière de l’établissement, que le collège universitaire enregistrait un excédent et de bons flux de trésorerie, nos membres, habitués à traiter des données et des faits, ont bien compris la situation. Il fallait simplement recueillir l’information et leur présenter. Et les choses étaient claires : non, le collège universitaire n’était pas en difficulté financière, et oui, il avait les moyens de concrétiser l’équité salariale. Nous avions aussi suivi la progression des salaires des ad-ministrateurs ces derniers temps, et cela nous a grandement aidés. Nos membres ont vu que l’austérité, ce n’était pas pour l’administration.
Comment avez-vous amené la communauté universitaire à comprendre vos enjeux?
Nous avons approché directement les leaders étudiants au milieu du processus de négociation. Nous les avons rencontrés pour parler de ce qui se passait. Nous voulions leur faire part de nos préoccupations et engager une conversation. Nous les avons tenus continuellement au courant, de la conciliation, du vote de grève, etc. Les leaders nous ont invités à leur premier conseil étudiant de l’année et nous avons pu les informer de l’état des choses. Leur réaction a été incroyable. Dès qu’ils ont compris les enjeux, ils nous ont offert leur plein soutien. Ils ont été très interpellés par l’écart salarial entre les sexes et ils sont devenus notre porte-parole.
Comment expliquez-vous que les membres de la BFA (des femmes, dans une proportion de 72 %) sont parmi les moins bien payés en Ontario?
Après notre accréditation en 2011, nous n’avons pas eu d’augmentation de salaire pendant quelques années. Les négociations de notre première convention collective ont été interminables et cela nous a fait reculer. Mais je pense qu’il faut aussi tenir compte du fait que Brescia a été fondé par des sœurs ursulines, qui n’attribuent pas la même valeur financière au travail.
Êtes-vous surprise de voir que les principes de l’équité salariale sont encore en jeu aujourd’hui?
D’une façon, oui. Malgré tout le chemin parcouru, les femmes se heurtent encore à des obstacles et nous devons continuer de nous battre pour avoir le même salaire que les hommes. Dans son rapport final, le Comité directeur de la Stratégie pour l’équité salariale entre les sexes de l’Ontario énonce des causes et propose des solutions. Beaucoup reste à faire pour remédier aux conditions et aux obstacles systémiques qui contribuent à l’écart salarial.
La charge de travail a aussi été un enjeu important des négociations. Qu’avez-vous obtenu?
Les professeurs à temps plein devaient donner huit cours sur une période de trois ans. Cette charge a été réduite à 7,5 cours sur la même période. Ce n’est pas assez, c’est sûr, mais cela montre que nous con-tinuons de faire des progrès.
Sur quoi votre association se concentrera-t-elle maintenant?
Nous devons continuer de surveiller les salaires. Nous avons comblé l’écart salarial pour l’instant, mais nos salaires demeurent au bas de l’échelle par rapport à tous les établissements de la province. L’écart est comblé, mais nous ne devons pas pour autant relâcher notre vigilance. Nous devons mettre en place un système d’information constamment à jour. Nous voulons également continuer de cultiver notre relation avec l’association étudiante.