L’Association canadienne des professeures et professeurs d’université (ACPPU) est d’avis que la dernière manœuvre en date entreprise auprès des tribunaux par la société pharmaceutique canadienne Apotex Inc. contre la professeure d’université Nancy Olivieri est une utilisation abusive et éhontée du système juridique canadien.
Dans un appel interjeté devant la Cour d’appel de l’Ontario à la fin de décembre, Apotex a demandé d’être relevée de l’obligation de se conformer à l’entente qu’elle a conclue en 2004 avec la Dre Olivieri afin de régler la procédure en diffamation.
Apotex a introduit ce nouvel appel malgré l’ordonnance d’exécution de l’entente que la cour d’appel a rendue il y a un an et demi.
« Apotex se sert de l’appareil judiciaire comme d’un manège pour embarquer les gens dans des poursuites interminables, peu importe les décisions prises par les tribunaux », a déclaré le directeur général de l’ACPPU, James Turk. « Aucune entreprise socialement responsable n’aurait recours à une tactique de ce genre contre un professeur d’université canadien ou contre un citoyen canadien. »
En juillet 2007, la Cour d’appel de l’Ontario a confirmé que la société Apotex et la Dre Olivieri avaient signé une entente obligatoire et exécutoire mettant un terme aux allégations de diffamation portées par les deux parties. La cour d’appel a admis la requête de la Dre Olivieri visant à faire exécuter l’entente de règlement et a ordonné aux deux parties de s’y conformer.
Apotex a fait opposition à l’ordonnance d’exécution de la cour d’appel pour le motif que la Dre Olivieri avait violé ou répudié l’entente en « dénigrant » la société pharmaceutique. La professeure Olivieri a nié cette allégation.
La cour d’appel a conclu qu’Apotex avait produit « très peu d’éléments de preuve » à l’appui de ses allégations de violation contre la Dre Olivieri, et que la société pourrait ultérieurement engager une procédure, si elle le souhaitait, pour faire valoir ses allégations selon lesquelles la Dre Olivieri avait violé ou répudié l’entente de règlement.
Un an plus tard, en juillet 2008, comme Apotex refusait toujours de s’acquitter de ses obligations qui lui étaient faites aux termes de l’entente, la Dre Olivieri a cherché encore une fois à faire exécuter les dispositions de l’entente et celles de l’ordonnance de la cour d’appel rendue en 2007. Apotex a réitéré ses accusations de « dénigrement » contre la professeure.
En septembre 2008, cette dernière a présenté à la Cour supérieure de l’Ontario une requête en vue d’obliger Apotex à obtempérer à l’ordonnance d’exécution de la cour d’appel. Au début de novembre, Apotex a porté ses allégations de « dénigrement » contre la Dre Olivieri devant la cour supérieure dans le cadre d’une nouvelle instance judiciaire. Apotex cherchait à faire rejeter la requête de la Dre Olivieri sur la base de ses allégations présentées en cour supérieure.
Le 28 novembre 2008, le juge George Strathy de la Cour supérieure de l’Ontario a ordonné à Apotex d’exécuter toutes les dispositions du règlement. Le juge a rendu public pour la première fois l’obligation faite à Apotex en vertu de l’entente de verser un montant de 800 000 $ à la Dre Olivieri.
Maintenant, dans un nouvel appel introduit à la fin de décembre, Apotex demande à la cour d’appel d’annuler la décision du juge Strathy et de rejeter la requête de la Dre Olivieri visant à obliger la société pharmaceutique à se conformer à l’entente de règlement de 2004. Parallèlement, dans une autre requête présentée devant la cour d’appel, Apotex demande de différer son obligation de se conformer à l’entente de règlement jusqu’à ce que ses allégations de « dénigrement » contre la Dre Olivieri fassent l’objet d’un procès.
« Apotex semble croire qu’elle peut tout simplement faire fi de l’entente de règlement originale et de l’ordonnance précédente de la cour d’appel si cela peut servir sa tactique accusatoire contre la Dre Olivieri », a indiqué M. Turk. « Comment les citoyens canadiens peuvent s’assurer de disposer d’un minimum de protection juridique contre les grandes entreprises quand une société comme Apotex peut aisément opprimer un professeur d’université? »
L’avis officiel du nouvel appel interjeté par Apotex peut être consulté
ici.
Dans un communiqué diffusé le 1
er décembre 2008, l’ACPPU s’est dite sérieusement préoccupée face à la poursuite pour « dénigrement » intentée par Apotex devant la Cour supérieure de l’Ontario. Elle dénonce cette action non seulement comme une tentative visant à empêcher la Dre Olivieri de participer à des débats sur des questions systémiques d’intérêt public, mais aussi comme une atteinte flagrante à la liberté académique. (Voir le
communiqué du 1er décembre de l’ACPPU).